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l’établissement de Watt à Soho, qui lui parut le terrain propre à la réalisation de ses idées sur l’éclairage au gaz. Par une de ces coïncidences merveilleuses, qu’on est plus habitué à trouver dans les romans que dans la vie réelle, tous deux, qui ne se connaissaient pas personnellement, furent réciproquement poussés à se rechercher. Ils quittèrent le même jour leur maison, s’arrêtèrent à moitié chemin pour passer la nuit dans la même auberge, et là, en causant comme deux voyageurs au coin du feu, ils se racontèrent l’objet de leur voyage. Le résultat de cette rencontre curieuse et de l’entente réciproque de ces deux penseurs fut l’émigration de Murdoch, qui partit à la fonderie de Soho pour y continuer ses essais sur une grande échelle, et y appliquer l’éclairage au gaz[1]. »

Fig. 62. — Premier appareil de Murdoch pour la distillation de la houille.

La figure 62 représente la cornue dont Murdoch fit usage en 1798, pour essayer, dans l’usine de Soho, l’application à l’éclairage du gaz extrait de la houille. C’est tout simplement un creuset de fonte, E, rempli de charbon, et placé dans le foyer, F. Le gaz se dégageait par le tube D. On rechargeait la cornue, après chaque opération, par l’orifice du creuset refroidi. Rien, on le voit, n’était plus grossier. Aussi l’essai fait en 1798 dans l’usine de Soho, ne reçut-il alors aucune suite.

Ce ne fut qu’en 1803 que l’on songea sérieusement, dans la fabrique de Watt et Boulton, à éclairer les ateliers par le gaz. On avait préludé à cette entreprise par une illumination extérieure de la façade de la maison, à l’occasion de la paix d’Amiens (mars 1802). Murdoch s’était contenté de placer dans un fourneau une cornue semblable à celle que nous avons figurée plus haut, et de diriger le gaz à l’extérieur, au moyen d’un tube. Il produisit ainsi aux deux bouts de la façade, deux grosses flammes, pareilles à ce que nous appelons en France feux de Bengale.

En 1802, l’usine de Soho n’était donc nullement éclairée au gaz, comme l’ont dit si souvent les écrivains anglais. On s’y servait, de l’aveu de Samuel Clegg, de lampes à huile, et non de gaz. En 1803 seulement la fonderie de Soho commença, comme nous venons de le dire, à être éclairée au gaz extrait de la houille. Les appareils de fabrication et de distribution qui furent employés, étaient, d’ailleurs, fort grossiers. Le gaz, au sortir de la cornue, était conduit directement et sans recevoir aucune purification, dans un gazomètre, contenant à peine 8 mètres cubes. Il se rendait de là, à travers des tuyaux de cuivre soudés, dans des becs, qui donnaient une flamme en forme d’ergot de coq.

La figure 63 représente l’appareil que Murdoch employa dans l’usine de James Watt, à Soho, pour distiller la houille. Il ne diffère, on le voit, du premier, qu’en ce que la cornue est placée horizontalement dans le fourneau au lieu d’y être posée verticalement. Seulement, la cornue M est divisée en deux parties, réunies par des boulons. Pour retirer le coke et recharger la cornue, on enlevait la partie antérieure. Le gaz se dégageait par le tube N.

  1. Traité d’éclairage par le gaz, par N. H. Schilling, ingénieur-directeur de la Compagnie du gaz de Munich, traduit de l’allemand par Ed. Servier, ingénieur sous-chef du service des usines de la Compagnie parisienne du gaz. Paris, 1868, in-4.