Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/326

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dans les intérêts de l’oracle et du dieu ; et si, par le moyen des domestiques et des étrangers, ils découvraient quelque chose qui fût bon à savoir, vous ne devez pas douter que les prêtres n’en fussent avertis.

Le faux prophète Alexandre, qui avait établi son oracle dans le Pont, avait bien jusque dans Rome des correspondants, qui lui mandaient les affaires les plus secrètes de ceux qui l’allaient consulter.

Par ces moyens, on pouvait répondre même sans avoir besoin de recevoir de billet ; et ces moyens n’étaient pas sans doute inconnus aux prêtres de l’Apollon de Claros, s’il est vrai qu’il suffisait de leur dire le nom de ceux qui les consultaient. Voici comme Tacite en parle au deuxième livre des Annales : « Germanicus alla consulter Apollon de Claros. Ce n’est point une femme qui y rend les oracles comme à Delphes, mais un homme qu’on choisit dans de certaines familles, et qui est presque toujours de Milet. Il suffit de lui dire le nombre et les noms de ceux qui viennent le consulter ; ensuite il se retire dans une grotte, et ayant pris de l’eau d’une source qui y est, il vous répond en vers à ce que vous avez dans l’esprit, quoique le plus souvent il soit très ignorant. »

Nous pourrions remarquer ici que l’on confiait bien à une femme l’oracle de Delphes, parce qu’il n’était question que d’y faire la démoniaque ; mais que comme celui de Claros avait plus de difficulté, on ne le donnait qu’à un homme. Nous pourrions remarquer encore que l’ignorance du prophète, sur laquelle roule une bonne partie de ce qu’il y a de miraculeux dans l’oracle, ne pouvait jamais être fort bien prouvée ; qu’enfin le démon de l’oracle, tout démon qu’il était, ne pouvait se