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regardé comme un personnage. Ce grand homme ne put pardonner à l’étymologiste : il lui fit rayer la pension dont il jouissait. En vain il fit des vers à sa louange ; Colbert fut inexorable et eut toujours pour l’étymologiste une aversion insurmontable[1].

Enfin le mot collibertus est entré dans la composition de plusieurs noms de lieux, sans nul doute à cause des colliberts qui y faisaient leur demeure. On trouve un Malgerius de Culvertville dans le cartulaire de l’abbaye de la Sainte-Trinité-du-Mont de Rouen, publié par M. A. Deville, à la suite du cartulaire de l’abbaye de Saint-Bertin[2], et les dictionnaires géographiques indiquent trois villages de Cuvertville, l’un situé dans le département de l’Eure, et les deux autres dans celui de la Seine-Inférieure. Nous pensons également qu’il ne faut pas chercher ailleurs l’étymologie de Coubert, village du département de Seine-et-Marne, arrondissement de Melun, canton de Brie-Comte-Robert. Il résulterait de là, aussi bien que des passages rapportés ci-dessus, que la classe d’individus nommés colliberts était à peu de chose près répandue par toute la France, où leur condition différait peut-être selon les localités. Nous avons vu plus haut qu’il y avait aussi des colliberts en Angleterre et en Espagne.

De tout ce qui précède il ressort évidemment, ce me semble, que le mot collibert n’a jamais été, n’a jamais pu être, sinon à une époque moderne, le nom vulgaire des Cagots du Bas-Poitou ; comme le mot colliberti, quoi qu’en dise Pierre de Maillezais, n’a dû être dans l’espèce qu’une appel-

  1. Dict. étym. de la langue française, par Ménage, édition de Jault, t. Ier, p. 427 ; Monde primitif… considéré dans les origines françaises, col. 269.
  2. Collection de documents inédits sur l’histoire de France, etc. À Paris, m dcc xl, in-4 : p. 456.