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Poitevins au XIIe siècle (reproche dont la fausseté est démontrée un peu plus loin par l’auteur qui s’en fait l’écho), résume complètement aussi les principales accusations dont ces malheureux ne tardèrent pas à être les victimes, et qui les suivirent partout où ils allèrent se réfugier. Il ne paraît pas, néanmoins, qu’ils aient été traités, dans le Bas-Poitou, avec autant de rigueur qu’en deçà et au-delà ; et cette bienveillance relative qu’on leur témoigna, jointe à cette circonstance qu’ils étaient en petit nombre depuis les invasions des Normands, qui les avaient décimés, dut leur permettre de se fondre rapidement dans la population indigène. Ce qu’il y a de certain, c’est que, si, à une époque plus ou moins ancienne, ils ont été désignés par les appellations de Colliberti et de Cagots, la tradition s’en est perdue dans le pays[1]. La seule chose qui ait persisté, c’est la coutume de vivre sur l’eau. On voit encore de nos jours des familles habiter sur des barques, au milieu des marais formés par la Sèvre, du côté de Marans ; ces gens-là sont désignés par le nom de Huttiers. Il est permis de croire que ce sont des descendants des anciens Colliberti, dont la mémoire serait complètement éteinte, si Pierre de Maillezais ne l’eût préservée de l’oubli.

Quant aux Cagots qui se trouvaient entre la Guienne et le Bas-Poitou, c’est-à-dire dans la Saintonge et dans l’Angoumois, ils n’ont pas été aussi heureux : aucun chroniqueur ne s’en est occupé, aucun acte ne constate leur existence d’une manière certaine ; et cependant on ne saurait douter que les deux dernières de ces provinces n’aient eu leurs Cagots comme les premières : quelle cause eût empêché les émigrés espagnols, chassés des terres qu’ils tenaient de la libéralité des princes francs, de s’arrêter sur les bords de la Charente, comme ils l’a-

  1. Lettre de M. Rougier de Labergerie, juge de paix de Maillezais, en date du 29 juillet 1842.