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Page:Francisque-Michel - Histoire des races maudites, tome II.djvu/9

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Mais si, dans l’antiquité, les colliberti étaient des affranchis, au moyen âge leur état était loin d’être aussi heureux : un grand nombre de monuments authentiques prouvent que, chez nos ancêtres, ils étaient vendus, donnés, affranchis et assimilés en tout aux serfs.

C’est ainsi qu’en 973, le roi Lothaire donne à Arbert, vicomte de Thouars, un fief appelé la Faye, avec une chapelle dédiée à saint Hilaire, cum silvis, aquis, aquarumve decursibus, simulque et collibertis utriusque sexus[1], et que, vers la même époque une chronique range les colliberts avec les serfs et les esclaves[2]. En 1031, un concile de Bourges défend d’admettre à la cléricature les serfs et les colliberts avant qu’ils aient été affranchis en présence de témoins[3]. J. B. Souchet, dans ses observations sur les lettres d’Yves de Chartres, rapporte un acte capitulaire d’après lequel ce-

  1. Gallia christiana, ed. prior, tom. iv, p. 179, col. 2, b ; edit. poster., tom. iv, col. 366. — Rec. des Hist. des Gaules, tom. ix, p. 634, a.
  2. « Audiens autem Comes (Herbertus), quod fugisset Antistes (Avesgaudus), invasit vi domos suas… Nec hoc suffecit ei ; sed etiam servos et mancipia Episcopi, et colibertos tamdiu tenuit in carcere, donec cuncta reddiderunt quæ habebant. » Acta Pontificum Cenomannensium, cap. xxx. (Vetera Analecta, ed. D. Mabillon, in-folio, p. 304, col. 1 ; Rec. des Hist. des Gaules, tom. x, p. 385, k, circa an. 996.)

    Si l’on en croit J. F. Bodin, Foulques Nerra, comte d’Anjou, bâtit des villes, des châteaux, des églises et des monastères en si grand nombre, que pour y attirer des habitants « il concéda plusieurs franchises aux Colliberts ou Serfs de son domaine ; il leur accensa des terres, et leur permit d’en vendre les fruits, à certains jours, dans les marchés qu’il établit en divers endroits. » Recherches historiques sur l’Anjou et ses monument, (Angers et le Bas-Anjou.) Saumur, chez Degouy aîné, 1821-23, deux voIumes in-8 ; tom. Ier, p. 188. Le savant Angevin s’appuie de la charte de fondation de l’abbaye de Beaulieu en Touraine. Nous avons lu cet acte, dont on trouve le texte et la traduction dans le Dictionnaire historique, géographique… du département d’Indre-et-Loire, par Jr. M.tin. Je. M.x. Dufour (de Tours). 2e arrondissement (Loches). Tom. Ier, Tours, Letourmy. 1812, in-8, p. 35-37, et nous pouvons assurer qu’il n’y est nullement question de Colliberts. Bodin y a vu un affranchissement de serfs, et en sa qualité d’Angevin il a appelé ces serfs Colliberts ; mais ici ce mot a été apporté par lui : il n’a pu le trouver dans la charte de Beaulieu, où, nous le répétons, celui-ci n’existe pas.

  3. Sacrosancta Concilia… studio Philip. Labbei, et Gabr. Cossartii, tom. ix, p. 866, c.