Page:Friedrich Carl von Savigny - Traité de droit romain, Tome 1, 1855.djvu/72

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nombreuses influences, et d’abord quant à sa réalité même. En effet, c’est l’État qui personnifie le peuple et lui donne la capacité d’agir. Si, hors de l’État, on peut concevoir comme abstraction un droit privé, fondé sur une communauté d’idées et de mœurs, dans l’État, l’établissement du pouvoir judiciaire donne seul au droit privé la réalité et la vie. Mais il ne faut pas croire qu’il y ait effectivement dans l’histoire une époque antérieure à la fondation de l’État, et où le droit privé ait-eu cette existence incomplète (état de nature). Chaque peuple, dès qu’il fait acte de vie, est déjà constitué comme État, quelle qu’en soit d’ailleurs la forme. Cet état de nature est donc une hypothèse que crée notre esprit, lorsqu’il considère le peuple, abstraction faite de l’État.

Les rapports des individus avec le droit général reçoivent de l’État leur réalité et leur complément. Le droit est l’expression de l’esprit commun de la nation (§ 7, 8), et par conséquent de sa volonté, qui est aussi la volonté de tous les individus. Mais chaque individu peut, en vertu de sa liberté, agir contre l’idée et la volonté manifestées par lui comme membre de la nation. Cette contradiction est l’injustice ou la violation du droit, qui doit être réprimée si l’on veut conserver au droit son empire et son existence. Pour que cette répression ne soit pas l’effet du