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Page:Galien-Oeuvres anatomiques physiologiques et médicales-T2-1856.djvu/252

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DES FACULTÉS NATURELLES, I, xiv-xv.

étonnante encore, parmi ces médicaments, non-seulement les uns font sortir les pointes et les autres le venin, mais, parmi ceux qui extraient le venin, les uns attirent les venins de la vipère, d’autres celui du pastenaque (espèce de raie), d’autres celui de quelque animal différent, et l’on peut voir clairement ces venins déposés sur les médicaments. Ici rendons un nouvel hommage au respect d’Épicure pour le fait évident, mais blâmons l’explication qu’il donne de la cause. N’est-ce pas en effet le comble de l’absurdité, de croire que cette pointe, qu’à l’aide de nos doigts nous ne pouvons tirer, est extraite par ces petits corpuscules ?

Ne sommes-nous pas déjà convaincus qu’il existe dans chacun des êtres une faculté par laquelle ils tirent la qualité propre, l’un plus, l’autre moins[1] ? Ou bien apporterons-nous encore à l’appui de notre raisonnement l’exemple du blé ? Ceux qui nient absolument l’attraction d’un objet par un autre paraîtront, je pense, plus ignorants des choses de la nature que les laboureurs. La première fois que j’entendis conter le fait, je fus étonné et je voulus moi-même en être témoin. Ensuite, l’expérience ayant confirmé le récit, j’en cherchai longtemps la cause dans tous les systèmes, sans en trouver aucune qui fût seulement vraisemblable, toutes étant ridicules et évidemment fausses, excepté celle qui donne la priorité à l’attraction. Voici le fait : En Asie, les laboureurs qui des champs transportent à la ville le blé dans des chariots, s’ils veulent en soustraire sans risque d’être découverts, placent, après le vol, parmi les tas de blé des vases d’argile remplis d’eau. Le blé, attirant à lui l’humidité à travers l’argile, augmente de volume et de poids, sans que ce changement se trahisse aux yeux, à moins qu’instruit d’avance on n’observe plus attentivement. Cependant, placez ce même vase sous un soleil ardent, vous n’apercevrez chaque jour qu’une diminution très-peu sensible. Ainsi donc le blé possède à un plus haut degré que la chaleur si puissante du soleil la faculté d’attirer à lui l’humidité voisine. C’est donc un pur enfantillage de prétendre qu’il y a transport vers les particules ténues de l’air ambiant, surtout lorsqu’il est très-échauffé, puisque cet air, beaucoup plus ténu que le blé, n’absorbe pas la dixième partie de l’humidité qui pénètre dans ce blé.

  1. Cf. Util. des part., XIV, 11, p. 120 et XV, 5, p. 145. Cf. aussi IV, xiii.