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HISTOIRE DU CANADA.

À peu près dans le même temps le bruit courait que le gouverneur avait reçu des dépêches dans lesquelles le ministre renvoyait les accusations portées contre le juge Foucher au conseil législatif. Cette décision équivalait à un rejet pur et simple. Après quelques débats, le conseil qui voulait s’assurer de la vérité de ce bruit, vota une adresse au gouverneur pour lui demander s’il était fondé, et dans le cas affirmatif s’il voulait bien lui communiquer la dépêche totale ou partielle du prince Régent à cet égard. Il transmit un message aux deux chambres pour les informer que cette rumeur était vraie ; mais qu’il n’avait reçu aucune instruction sur la manière d’exécuter la sentence ; qu’il en avait écrit à Londres et qu’il ne manquerait pas de leur communiquer la réponse qu’il attendait aussitôt qu’il l’aurait reçue. Cette réponse fut apportée par le duc de Richmond, qui la transmit l’année suivante à l’assemblée. Il fallait que celle-ci fournît ses preuves par écrit à l’appui des accusations contre le juge Foucher ; que copie des accusations et des preuves fussent transmises par le gouverneur à l’accusé pour préparer sa défense ; qu’ensuite la défense, envoyée au gouverneur, fût communiquée à l’assemblée pour sa réplique, après quoi le tout serait renvoyé en Angleterre pour faire ce qui serait convenable.

Toutes ces formalités auxquelles on voulait assujétir la représentation, tous ces va-et-vient étaient de pures moqueries et blessèrent profondément la dignité de l’assemblée, qui se voyait traitée comme un simple individu par un ministre placé à mille lieues d’elle et qui dépendait lui-même d’un parlement qui ne pouvait rien voir ni connaître de ce qui se passait en Canada. En effet, le ministre se réservait contre tous les principes de la constitution, avec un superbe silence, le droit de juger en secret d’une manière absolue et définitive. Rien n’était plus propre à rendre plus vivaces les germes de discorde qui existaient déjà dans le pays qu’une conduite qui paraissait si contraire à tous les usages reçus dans les pays libres.

Le reste de la session fut rempli par les débats sur le budget. L’estimation des dépenses publiques se montait à £74,000. £33,000 étaient couverts par des appropriations permanentes. Il restait £40,000 à voter pour l’année courante. Cette somme fut mise à la disposition du gouverneur en attendant qu’on pourvût