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HISTOIRE DU CANADA.

composition du conseil législatif et de la chambre d’assemblée, où le Haut-Canada devait avoir une représentation trois fois plus considérable que celle du Bas, eu égard à sa population ; de la qualification pécuniaire trop élevée des membres ; de la taxation inégale. La clause aussi qui autorisait le gouverneur à nommer des conseillers exécutifs qui auraient droit de siéger et de discuter mais non de voter dans l’assemblée, était à leurs yeux une déviation singulière de la constitution anglaise, et ils ajoutaient que celle qui proscrivait la langue française avait excité de vives réclamations. La langue d’un père, d’une mère, de sa famille, de ses amis, de ses premiers souvenirs, est chère à tout le monde disaient-ils, et cette intervention inutile dans la langue du peuple du Canada était vivement sentie dans un pays où cette langue avait été, sans contredit, une des causes qui avaient le plus contribué à conserver cette colonie à la Grande-Bretagne à l’époque de la révolution américaine.

Les députés protestèrent aussi contre la clause du bill qui tendait à faire nommer les curés catholiques par le gouverneur et l’évêque conjointement contre toute loi, contre tout usage même dans l’église protestante, et finissaient par demander que si l’on se proposait plus tard de reprendre la mesure, il fut ordonné au gouverneur de faire faire un recensement et de faire passer une loi dans le Bas-Canada pour nommer des commissaires chargés de venir en Angleterre soutenir la constitution canadienne. Le gouvernement cherchait toujours, comme on voit, à usurper le pouvoir ecclésiastique en s’emparant de la nomination des curés, et à mettre le clergé catholique dans sa dépendance. Mais la religion plus forte que les choses temporelles et la politique, mettait un obstacle infranchissable à l’ambition et aux préjugés du bureau colonial. Cette tentative indique encore une fois la source où sir James Craig puisait ses inspirations, et qu’en religion comme en politique, les désirs secrets de la métropole étaient toujours la destruction de toutes les anciennes institutions canadiennes.

En présence d’une opposition aussi générale quant à l’opinion, et aussi puissante quant à la logique et à la justice, le ministère dut retirer sa mesure. Mais n’osant plus se fier à lui après tout ce qui s’était passé, malgré ses assurances qu’elle serait laissée là pour la session, il fut convenu entre les deux agens que M. Papi-