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Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome IV, 1852.djvu/299

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HISTOIRE DU CANADA

vole et limitée à un coin du pays ; mais elle a été accompagnée d’invasions et d’agressions contre les personnes et contre les propriétés des sujets de sa Majesté sur toutes les parties de la frontière des États-Unis par des habitans des États-Unis. » Déjà M. Roebuck avait publié plusieurs lettres dans les journaux de Londres pour blâmer la conduite de Lord Durham, qui, en sa qualité de chef du parti radical, n’allait pas manquer cependant d’amis dans la presse pour prendre sa défense. Il s’était entouré depuis longtemps de partisans et de créatures qui vantaient en toute occasion son patriotisme et ses talens. Ils se mirent tous à louer son énergie dans sa mission et le rapport qu’il venait de présenter au gouvernement. Tous leurs coups se dirigèrent naturellement contre les Canadiens.

Ce rapport excessivement long, mais écrit avec beaucoup d’art et de soin, était un plaidoyer spécieux en faveur de l’anglification, tout en donnant gain de cause aux principes que la chambre d’assemblée avait de tout temps défendus. Le séjour qu’il avait fait parmi les Canadiens avait complètement changé ses idées, disait Lord Durham, sur l’influence relative des causes auxquelles on devait attribuer les maux existans. Il s’attendait à trouver une lutte entre un gouvernement et un peuple, et il avait trouvé deux nations se faisant la guerre au sein d’un seul état ; non une guerre de principes mais une guerre de race ; l’une éclairée, active, entreprenante ; l’autre ignorante, inerte, et soumise aveuglément à des chefs que conduisaient d’étroits préjugés ; celle-ci composée de torys déguisés qui cherchaient à cacher leur hostilité à l’émigration anglaise sous l’apparence d’une guerre de principes contre le gouvernement ; l’autre de vrais démocrates, d’hommes vraiment indépendans ; les deux enfin toujours en présence, mais séparés en deux camps qui ne se mêlaient jamais. « Tel est, ajoutait-il, l’état lamentable et hasardeux des choses produit par le conflit de race qui divise depuis si longtemps le Bas-Canada, et qui a pris le caractère formidable et irréconciliable que je viens de dépeindre. »

Après s’être étendu longuement sur cette division, sur ses causes et sur ses effets, il passe au remède pour y mettre fin. « Il y a deux modes, dit-il, de traiter un pays conquis. Le premier est de respecter les droits et la nationalité des posses-