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HISTOIRE DU CANADA.

Craig qui avait une manière à lui de gouverner, n’avait pas seulement cherché à dominer le parlement, il avait voulu aussi mettre à ses pieds le clergé. Il s’était persuadé qu’il pourrait conduire tout à sa guise par la violence et l’intimidation, et comme il avait imposé sa volonté dans les choses politiques, il croyait pouvoir ainsi corrompre et intimider l’évêque catholique, mettre son clergé dans la dépendance de gouvernement, en lui faisant abandonner pour se l’arroger ensuite la nomination des curés. La soumission de M. Plessis qui avait été jusqu’à lire ses proclamations et faire des allocutions politiques en chaire, lui avait fait croire qu’il ferait de ce prélat ce qu’il voudrait ; mais il fut trompé. L’évêque n’avait cédé en politique que pour acquérir et non pour perdre en religion. Il y eut trois entrevues au château St. Louis entre ces deux hommes, dans les mois de mai et de juin 1811, dont l’une dura près de deux heures, dans lesquelles le gouverneur put se convaincre que le clergé serait aussi ferme pour défendre ses droits que la chambre d’assemblée.

Nous avons vu les efforts qui ont été faits en différens temps depuis la conquête pour abattre l’église catholique et implanter le protestantisme à sa place. Nous avons fait remarquer que la révolution américaine sauva le catholicisme en Canada, ou pour parler plus exactement, l’empêcha d’être persécuté, car on ne l’aurait pas plus éteint en Canada qu’en Irlande. On peut ajouter que la dispersion du clergé français par le régime de la terreur en 1793 contribua beaucoup à apaiser aussi à Londres les préjugés contre l’église romaine ; et que le contrecoup fut assez sensible en Canada pour y laisser permettre l’entrée des prêtres, sujets des Bourbons, qui en étaient spécialement exclus avant la révolution.[1]

  1. La révolution française si déplorable en elle-même, écrivait l’évêque de Québec, M. Hubert à l’évêque de Léon à Londres, montre en ce moment trois grands avantages au Canada, celui de donner retraite à d’illustres exilés, celui de se procurer de nouveaux colons et celui d’avoir de zélés ministres…

    Les émigrés français ont éprouvé d’une manière bien consolante les effets de la générosité anglaise. Ceux qui viendront en Canada ne doivent pas naturellement s’attendre à de puissants secours pécuniaires. Mais les deux provinces leur offrent de toutes parts des ressources.

    Par rapport aux ecclésiastiques dont il paraît que le gouvernement veut