CHAPITRE V
Divers abus du XVIII° siècle.
Achat de cahiers manuscrits. — Plaintes de la Faculté ; elle sévit rarement. Effet pernicieux de ces désordres. — Demande de la Faculté au Roi.
Dès le commencement du XVIII° siècle, par suite des faveurs
répétées accordées aux titres nobiliaires ou aux protections influentes,
par suite aussi de l'état d’esprit dans lequel les honteuses
années de la Régence jetèrent toutes les classes de la société,
l’École de droit vit dépérir dans beaucoup de ses élèves le peu
d’amour de la science qu’ils conservaient encore. Les étudiants,
au lieu d’écrire eux-mêmes le résumé des traités exposés en
chaire par les professeurs, recouraient à des mains mercenaires
pour s’acquitter de cet ouvrage. Ainsi, plus facilement ils pouvaient
s’absenter des cours, et plus allègrement ils portaient la
contrainte des études. Les fruits qu’ils retiraient d’une méthode
aussi commode n’étaient pas abondants, cela se conçoit. Quels
étaient, en réalité, les vrais coupables d’un tel état de choses ?
C’étaient assurément les jeunes gens, mais surtout leurs parents qui
souriaient à cette légèreté coupable, et peut-être aussi les maîtres
qui fermaient complaisamment les yeux sur de tels abus. Pour
l’excuse de tous ces frivoles complices, il convient d’ajouter
qu’ici, comme dans beaucoup de dérèglements analogues, il faut
blâmer l’entraînement général, la mode, à l’esclavage de laquelle
il n’est personne qui sache toujours résister. On trouvait qu’il
était de bon ton de se débarrasser de la copie du cours : c’en était
assez pour faire une loi de cet absurde préjugé. Au reste, des
jeunes gens adonnés à toutes les folies du luxe et à tous les entraînements
du plaisir, pouvaient-ils sérieusement songer au travail[1] ? La distinction affectée et les manières féminines des jeunes
conseillers au Parlement sont proverbiales[2] : les étudiants n’a-
espérances qu'on avait fondées sur elle. Son insuccès eut, suivant moi, pour cause
principale l’inobservation des sages règlements de 1679.»
- ↑ «Et mirari quis posset quod studiis nostris tam segniter incombant adolescentes ; mirari potius debemus, quod in scholis nostris extent adolescentes aliqai, qoos paréotum exempta , laboris amor, indoles optima, glorie stimulas, ad ezcolenda sûidia coromovent, sed, rari nantes in gurgile vasto,» Oraiio â cens, D,, Ed. IIarttii, un, p. 21.
- ↑ Cf. : Lettre sur la Galanterie des jeunes Conseillers au Parlement de Paris, écrite à un avocat de province, par M. di Lapeyre (Londres, 1750). — N. os Saint-Cyr, Tableau du siècle (1761).