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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome I.djvu/554

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Quatre grâces.

Afin que, dans leur patrie, les Arabes parcourent gaiement l’étendue, Allah, pour le salut commun, leur accorde quatre grâces.

D’abord le turban, parure plus belle que toutes les couronnes ; une tente, qu’on enlève de la place, pour demeurer partout.

Un cimeterre, défense plus sûre que rochers et hautes murailles ; une chanson, qui charme et profite et se fait écouter des belles.

Et si, par mon chant, sans me troubler, je fais choir les fleurs de son châle, elle sait à merveille ce qui lui appartient, et me reste favorable et riante.

Et je sais vous servir gentiment fleurs et fruits. Voulez-vous aussi des moralités, je vous en servirai de toutes fraîches.

Aveu.

Quelle chose est difficile à cacher ? Le feu : car, pendant le jour, la fumée trahit le monstre, et, pendant la nuit, c’est la flamme. L’amour aussi est difficile à cacher : si secrètement qu’on le nourrisse, il s’élance du regard bien aisément. Mais ce qu’il y a de plus difficile à cacher, c’est une chanson. On ne la met pas sous le boisseau. Le poëte vient-il de la chanter, il en est tout pénétré ; l’a-t-il écrite nettement, élégamment, il veut la voir aimée de tout le monde, et, joyeux, il la débite à chacun d’une voix forte, que cela nous excède ou nous charme.

Éléments.

De combien d’éléments doit se nourrir un bon poëme, pour qu’il soit goûté des ignorants et que les maîtres l’entendent avec plaisir ?

Avant toute chose, quand nous chantons, que l’amour soit notre thème : si l’amour peut pénétrer la mélodie tout entière, les accents en seront bien plus doux.

Qu’ensuite retentisse le bruit des verres et que le vin scintille en rubis : car c’est aux amants, c’est aux buveurs, que l’on sourit avec les plus belles couronnes.

Je veux entendre aussi le bruit des armes ; que la trompette