Page:Goncourt - Sophie Arnould.djvu/31

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à Mme de Conti : « Je la veux pour moi, ma cousine, vous mêla donnerez ? » Dans un des cabinets de la garde-robe, des sirops furent apportés ; la Reine caressa Sophie de paroles, et la quitta en lui donnant un petit soufflet d’amitié avec son éventail.

Mais il y avait une autre reine de France : Mme de Pompadou. Le lendemain de l'entrevue avec la Reine, la femme de chambre de Mme de Pompadou, Mme Du Hausset, apportait à Mme de Conti une lettre où Mme de Pompadou la priait, comme elle savait prier la plume en main, de lui prêter sa petite chanteuse jusques au soir. Mme de Conti pensa faire atteler sur-le-champ ; mais ce qu’on appelait alors « les grandes convenances » lui vinrent bientôt à l’esprit. Ce fut une lutte entre la honte de manquer à la Reine et la crainte de blesser la favorite. Au bout de la lutte, Mme de Conti envoya chercher Mme Arnould, et la chargea d’aller présenter, de sa part, sa fille à Mme de Pompadou. Mme Arnould écrasa Sophie de ses bijoux et partit. Mme de Pompadou traversait son grand salon, lorsque Mme et Mlle Arnould entrèrent. Elle s’arrêta, regarda et dit : « La mère et la fille sont le portrait Tune de l’autre ; la mère a plus d’élévation dans la taille, la fille plus d’aventure et de roman dans le regard ! » Puis doucement : « Je vais chez le Roi pour deux minutes ; attendez-moi dans cette