Page:Goncourt - Sophie Arnould.djvu/47

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actrice, rassemblées à la fois plus de grâce, plus de vérité de sentiment, de noblesse d’expression, de belles études, d’intelligence et de chaleur ; je n’ai point encore vu de plus belles douleurs ; toute sa physionomie les peint, en rend toute l’horreur, sans que son visage perde le moindre trait de sa beauté[1] . » Et tout aussitôt l’opinion publique proclamait Sophie Arnould « l’actrice la plus naturelle, la plus onctueuse, la plus tendre qui ait encore paru ». Et Garrick déclarait que la chanteuse de l’Opéra était la seule tragédienne française qui parlât à ses yeux, à son cœur. Oui, cette Sophie était une chanteuse nouvelle[2] , et bien digne des couronnes de myrte et de lauriers qu’elle partageait avec Clairon[3] et que lui

  1. Journal et Mémoires de Collé, publiés par M. Honoré Bonhomme. Didot, 1868, vol. II.
  2. L'Année littéraire imprimait on 1760 : Mlle Arnould dans le rôle de Psyché a ravi tous les spectateurs de plaisir et d’admiration. Quelle actrice, quelle âme, quel pathétique !
  3. On connaît l’anecdote de la vente Randon de Boisset relative à Sophie Arnould : « Le buste de Mlle Clairon ayant été exposé, ces jours passés, à la vente du cabinet de feu M. Randon de Boisset, Mlle Arnould en doubla la première enchère : il n’y eut personne qui se permît d’enchérir sur elle, et le buste lui fut adjugé. Toute l’assemblée applaudit à différentes reprises. Un anonyme lui envoya sur-le-champ le quatrain suivant :

    Lorsqu’en l’applaudissant, déesse de la scène,
    Tout Paris t’a cédé le buste de Clairon,
    Il a connu les droits d’une sœur d’Apollon
    Sur un portrait de Melpomène.

    Correspondance littéraire de Grimm (mars 1777).