Page:Goncourt - Sophie Arnould.djvu/66

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tant de phrases, tant de mots bondis de sa bouche, gardés par l’anecdote comme la chanson, l’écho et le testament libre du XVIIIe siècle! des définitions de choses indéfinies qui ressemblaient à un coup de feu sur un revenant ; des soufflets du bout des doigts, des vengeances du bout des dents, des attaques et des ripostes, un génie comique, une compréhension, une imagination, une verve argent comptant ; une vision simultanée de l’intention, du sens, et de l’orthographe des paroles ; des bonnes fortunes de termes, des mariages d’inclination de mots, des saillies et des épigrammes qui s’échappaient de ses lèvres, sur l’aile de la plus jolie voix du monde ; des jeux de langue où le hasard avait l’esprit du pamphlet ; des railleries qui saluaient une illusion avant de la tuer ; des exécutions d’amour-propre en une seconde, le fouet de Beaumarchais cinglant et battant dos, visages et masques ; des mystifications pleines de grâces ; des parades à jouer sur un théâtre de la comédie humaine ; des caricatures morales ; des silhouettes à l’emporte-pièce ; des portraits indiscrets de ressemblance comme l’ombre des gens ; et Dieu, et le diable, et du La Rochefoucauld déboutonné, et de l’Aristophane au vin de Champagne, et des polissonneries oubliées sur terre par Piron, et des satires d’une ligne, et des épitaphes dont les vivants ne revenaient pas, et des épithètes mor-