Page:Goncourt - Sophie Arnould.djvu/67

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

-telles, et des riens qui sont devenus des maximes, et des maximes qui sont devenues des proverbes ! et des baptêmes d’idées qui ne sont plus à refaire, et des paroles qui ont fait l’esprit de bien des sots et la fortune de bien des causeurs ; et des drôleries à la pointe du mot, qui enlevaient le rire : notre jolie langue de finesse et de sous-entendus maniée dans le meilleur de ses délicatesses ; un tribunal enfin, l’esprit de Sophie ! le petit journal du temps, le compte-rendu malin de l’opinion publique, le censeur, et la terreur, et le lutin enjoué des hommes et des choses, des coulisses et des ministères, des systèmes et des événements, des modes et des soleils levants !… Et voltigeant à travers tout cela, comme une sagesse légère, comme une charité galante, la philosophie d’Épicure et de Ninon ; — et, tempérant la veine outrée, cette distinction de naissance, d’éducation et de monde que les filles possédaient alors.

Est-il besoin de répéter la réponse qu’elle a faite la première à un : «L’esprit court les rues. » — « C’est un bruit que les sots font courir[1] ! » et le mot sur la tabatière qui portait d’un côté Sully et de l’autre Choiseul : « Oui, c’est la Recette et la Dépense ! » ou bien le mot sur la

  1. Voyez pour les mots de Sophie l'Araoldiana (par Deville). Paris, 1813.