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CHAPITRE IV


HELVÉTIUS


Appréciation d’Helvétius par Bentham. — La notion d’idéal et de progrès introduite dans la morale et la politique utilitaires.
I. — La morale conçue comme une science expérimentale ; la physique des moeurs succédant à la géométrie des moeurs. — Premier principe : nécessité universelle. — L’univers moral arraché à l’inertie par le désir et l’intérêt. — Que l’homme, à proprement parler, est incapable d’aimer, de mériter ou de démériter. — La bienfaisance et le dévouement fondés sur l’absence réelle de bienveillance et sur l’égoïsme mutuel.
II. — Que l’intérêt, seul moteur des actions humaines, en doit être le seul appréciateur. — Analyse de la probité ou justice pour un individu, pour un groupe d’individus, pour l’Etat. — Plusieurs inconséquences d’Helvétius ; sont-elles essentielles à la doctrine épicurienne ? — La justice pour les siècles et les peuples divers. — Explication, par la variation des intérêts, de la variation des moeurs. — Lutte des intérêts, opposition des trois probités et des trois justices.
III. — Le législateur charge de ramener l’ordre au milieu de la lutte des intérêts. — Harmonie des intérêts, condition de la vertu. — Qu’il faut nécessiter les hommes à la vertu, — 1° par la sanction pénale, — 2° par la sanction de l’opinion, — 3° par l’éducation. — Le législateur produisant à son gré la vertu, le génie et l’héroïsme. — Le législateur veillant sur les moeurs. — Ce qu’Helvétius entend par les bonnes moeurs. — Nouvelles inconséquences d’Helvetius ; sont-elles propres au système utilitaire — Doctrine du salut public. — Religion d’Etat : l’intérêt divinisé.
IV. — Identification, fondamentale chez Helvetius, entre la morale et la législation, ou éthocratie. — Critique ingénieuse de la méthode de codification. — Que les codes devraient former un système bien lié et rattaché à un seul principe. — Le moraliste et le législateur unissant leurs efforts et transformant la nature humaine par Helvétius.
V. — Y a-t-il encore probité et justice, là où il n’y a plus de lois ? Qu’il n’existera de justice par rapport à l’humanité que lorsque des lois et des sanctions internationales règleront les relations des peuples — La philanthropie universelle rejetée.
Helvétius. prédécesseur immédiat de Bentham. — Progrès qu’il a fait accomplir à la morale épicurienne.

L’influence de La Rochefoucauld, combinée avec celle de Locke, de Hobbes et de Spinoza, suscita en quelque sorte Helvétius, et inspira ses deux grands ouvrages De l’ esprit et De l’homme. On sait quelle vogue extraordinaire obtint le premier de ces livres, non-seulement en France, mais en Angleterre, en Allemagne et dans toute l’Europe.

Voici comment Bentham, le grand utilitaire anglais,