Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de suivre leur routine, se marient, ont des enfants, font valoir un petit coin de terre que leur a apporté leur femme en dot, s’occupent de leurs affaires, fument, boivent et s’abrutissent en un mot…

Encore autant d’hommes enlevés à la science et à la cause de la civilisation !

Et le Muséum d’histoire naturelle ? Et le Collège de France ? Et la Sorbonne ? Entrons dans un de ces établissements et nous connaîtrons immédiatement les professeurs des autres, vu que la plupart des savants, qui sont arrivés à occuper une de leurs chaires, débordés tout à coup d’activité, font tous les efforts possibles pour occuper les autres. Il est vrai qu’Auguste Laurent, Gherardt, Gratiolet, meurent dans des places infimes, acceptées par désespoir ; mais M. Balard a deux chaires, M. Valenciennes et M. Milne Edward en ont chacun quatre : tout est pour le mieux ; de plus leurs fils, s’ils en ont, leur succéderont certainement ; car les chaires créent ni plus ni moins que des majorats scientifiques. Le Muséum est la propriété de ses membres. Ils y sont chez eux et nul ne peut les en extirper, eux et leur génération. Aussi en usent-ils à leur aise avec les collections, qui sont mal tenues et dispersées, que nul inventaire ne garantit. Du reste, c’est par cet ordre que brillent tous nos établissements scientifiques. Le 25 février 1858, n’a-t-on pas découvert, par hasard, dans des décombres, parmi de vieilles ferrailles, à l’Observatoire, l’étalon du mètre ? Sous prétexte de réparation, n’a-t-on pas abîmé le mètre de Borda ?

Voilà des faits qui prouvent la curieuse organisation qui place sans contrôle, dans la main de quelques autocrates, nos grands établissements scientifiques.

De plus, les professeurs y sont privés de toute indépendance parce qu’ils dépendent entièrement de quelques gros messieurs qui peuvent les tuer ou les faire avancer, à leur gré. M. Tom Richard, au Conservatoire des arts et mé-