Page:Hachette - Correspondance sur l’École Royale Polytechnique à l’usage des élèves de cette école, tome 2, 1813.djvu/55

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(45)

dence de ses découvertes, qui est telle, que quelquefois, sans doute, vous vous serez étonnés de ne les avoir pas faites vous-mêmes sans le secours de la science. En effet, tout ce qu’elle vous a révelé étoit en vous. Nous naissons tous géomètres. Ceux qui obtiennent ce titre n’ont d’autre avantage que d’avoir exercé leur esprit à reconnoître et rassembler toutes les notions que nous possédons sur l’étendue. Mais le génie qui guide dans les démonstrations appartient tout entier à la science. Vous aurez remarqué cette singularité, que la géométrie, cette science des corps, opère continuellement sur des abstractions ; elle assemble, elle divise, elle combine des idéalités ; et la nature physique, qui est passive, semble obéir à ses calculs, tant l’application de ses découvertes est rigoureuse. C’est cet esprit d’abstraction par excellence qui faisoit dire à Pascal, que toute la puissance de l’esprit se montroit dans la première page d’un livre de géométrie. C’est sans doute aussi dans ce sens qu’il faut entendre ce qu’on nous raconte de l’enthousiasme de cet ancien, à la vue de quelques figures géométriques tracées sur le rivage d’une île étrangere.

Vous avez ouï parler, jeunes Elèves, de l’enthousiasme de cet autre géomètre qui, pour soulever le globe entier, ne demandoit qu’un point d’appui. La partie de la Statique, que vous avez vue jusqu’à ce jour, a suffi pour vous expliquer la pensee de ce philosophe. Cette étude vous servira d’introduction à celle de la Mécanique, et vous marcherez de prodiges en prodiges.

Une autre branche des mathématiques, qui fut long-temps inconnue, long-temps aride et négligée, et qui, dans le siècle dernier, sembla recevoir une création nouvelle, tant ses pro cédés furent simplifiés et ses applications multipliées, l’Algébre, a dû aussi faire partie de vos études. L’algèbre, cet appui de l’esprit de recherche, a doublé ses forces dans toutes les carrières où elle l’a guidé ; aussi aujourd’hui toutes les barrières sont-elles tombées devant elle. Il n’est pas une branche des mathématiques qui n’ait reçu son application, et elles se sont toutes agrandies par ses calculs. Elle a prêté ses formules et sa rigoureuse exactitude aux sciences physiques. Depuis ce moment, elles ne s’égarent plus. La subtile métaphysique elle-même a souvent emprunté son langage et son appui. Heureuse, si ses débiles mains lui permettoient de porter ce fil à travers tous les dédales où elle s’engage !

L’algèbre est remarquable par l’étendue de ses recherches ; elle ne l’est pas moins par les procédés qu’elle emploie. Vous avez pénétré dans l’esprit de ces équations algébriques, qui n’offrent à la pensée que des traductions diverses d’un même énoncé,