Page:Hauvette - Littérature italienne.djvu/148

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distraire, il voyage, non par devoir ou par métier, mais pour le simple plaisir de voir, comme le jour ou il entreprit de faire l’ascension du mont Ventoux ; il est le premier touriste, le premier alpiniste des temps modernes. Partout il regarde curieusement et observe; mais partout il se retrouve lui-méme, avec ses passions et ses faiblesses.

Ce n’est guére que dans la seconde partie de sa vie, apres la mort de Laure (1348), quand l'age eut refroidi ses ardeurs juvéniles, qu’il réalisa ce bel équilibre, cette tranquillité, cette piété sereine qui ont fait l’admiration de ses familiers. Ame sincérement religieuse, Pétrarque était cependant fort éloigné de l’ascétisme des générations précédentes, et l’idéal de vie chrétienne dont il donna l’exemple fut encore une oeuvre d’art, dans laquelle il associa des éléments réputés jusqu’alors inconciliables : ses pieuses méditations ne faisaient aucun tort at sa passion pour l’antiquité, et son culte pour les auteurs profanes, non plus qu’au soin qu’il prenait de ses écrits et de la gloire qu’il en attendait. Sa retraite d’Arqua, comme jadis celle de Vaucluse, rappelait bien plus les Sapientum templa serena que les déserts de la Thébaide.

De toutes les incertitudes qui caractérisent la pensée de Pétrarque, les moins curieuses ne sont pas celles qui se rapportent at ses sentiments politiques. Exilé volontaire, à l’inverse de Dante — car il ne tenait qu’a lui de rentrer dans sa patrie, et les Florentins essayerent de l’y attirer, — il ne passa qu’une fois par Florence, en 1350, pour n’y plus revenir. Ses voyages, ses longs séjours en Provence peuvent le faire regarder comme un « citoyen du monde », s’élevant de la notion de patrie a celle d`humanité. Il fut pourtant profondément italien,