Page:Hauvette - Littérature italienne.djvu/204

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184 u·rri§nA·runs irannsxwx et gourmande l`incrédulité des hommes. En franchissant d’un bond vertigineux le détroit de Gibraltar, il explique, une dizaine d°années avant le grand voyage de Christophe Colomb, qu’au dela des mers il y a des continents habités par des hommes semblables Zi nous, et qui, bien que paiens, ne peuvent étre damnés : leur ignorance n`empéche pas que le sang du Christ n`ait été versé pour tous les hommes. Pulci n’a rien écrit de plus curieux, de plus spirituel, de plus hardi, et aussi de plus déconcertant que cet épisode. Les uns ont cru trouver une preuve de la solidité de sa foi catholique; les autres n’y ont vu qu’une continuelle dérision. La vérité parait étre que Pulci n°a pas plus voulu jeter le discrédit sur le christianisme que sur la chevalerie ; il n”est pas moins attaché a l’une qu’a l’autre, et l’on sent qu`il en parle avec plaisir; par malheur cet incorrigible railleur s’y prend de telle sorte qu’il est impossible de ne pas remarquer le clignement ironique de ses yeux et le pli malin de sa levre z il est toujours sur le point d’éclater de rire, justement quand il prend son air le plus sérieux. Dans le long et touchant récit de la mort de Roland, ne faut-il pas que l’ange Gabriel, descendu du ciel pour assister le paladin mou- rant, lui donne des nouvelles de Morgante et de Margutte? La muse de Pulci est éminemment plébéienne, par le tour de Vimagination, par la gaité un peu grosse, et par le style, répertoire inépuisable de locutions colorées, savoureuses, voire méme salées; celle du Politien a une élégance et une finesse tout aristocratiques. Angelo Am- brogini — son surnom est extrait du nom de sa ville natale, Montepulciano - si habile qu°il fut a tourner des élégies en latin et des épigrammes en grec, ne dédaigna pas plus que ses amis de rimer en langue vul-