Page:Hauvette - Littérature italienne.djvu/241

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grands Florentins, déclarait qu`étant Lombard il ne rougissait pas d’écrire en lombard. Ce n’était guére qu`une boutade, mais signilicative, surtout a une époque ou les polémiques sur la véritable définition de la langue italienne atteignaient toute leur acuité.

La question n’était pas nouvelle; Dante s’en était déja préoccupé. Mais depuis queltoute une série de chefs- d`oeuvre l’avait pratiquement résolue au profit du florentin, elle se posait plus pressante que jamais pour les écrivains étrangers a la Toscane : devaient-ils apprendre un dialecte dont l`usage leur était étranger ? Quand méme la chose eût été possible, leur amour-propre provincial s’y serait refusé. Aussi un gentilhomme lettré de Vicence, grand amateur de nouveautés poétiques et grammaticales, le Trissin, eut-il l’idée de remettre en honneur et de développer la théorie de Dante, alors tombée dans l`oubli : la langue a italienne », selon lui, devait se composer des éléments communs a tous les dialectes, et repousser les particularités de prononciation, de syntaxe et de vocabulaire propres at certaines provinces seulement. Cette bizarre utopie — car ou saisir cette langue que personne ne parle, et dont les promoteurs étaient bien forcés de recourir au toscan plus qu’ils ne le croyaient? — eut quelques partisans, surtout dans l°Italie du Nord. Le Trissin ne publia l’exposé complet de sa théorie qu’en 1529, dans son dialogue intitulé il Castellano; mais des 1513, étant de passage a Florence, il avait fait connaitre ses idées. Aussitot Machiavel y opposa une réfutation —· Dialogo interna alla lingua —- longtemps restée inédite, et dans laquelle, avec une netteté de vues qui fait une fois de plus honneur a la perspicacité de son esprit, il démontre que la langue littéraire est essentiellement le florentin, quels que soient les éléments étrangers qui y ont pénétré peu a peu.