Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XII.djvu/208

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Puis tout prend forme, tout se range
Comme en un enfer douloureux,
Et tout dans cette brume étrange
Devient distinct, et reste affreux.

Il voit les fortunes humaines
Comme un taillis vertigineux
Où resplendit l’oeil des sirènes
Sous des branchages épineux :

Il plonge son regard qui brille
 Dans ce gouffre aux aspects mouvants,
Dàns ces ténèbres où fourmille
L’aveugle foule des vivants.

À travers l’ombre et ses embûches,
Il entend bruire leurs voix
Comme des essaims dans les ruches,
Comme des oiseaux dans les bois.

Chacun travaille, -loi tracée
Par Dieu même à l’homme maudit !
L’un son champ, l’autre sa pensée.
L’un creuse, l’autre approfondit.

Tous vont cherchant, aucun ne trouve.
Le ciel semble à leur désespoir
Noir comme l’antre d’une louve,
Au fond d’un bois, l’hiver, le soir.

Où vont-ils ? . vers la mêrne porte.
Que sont-ils ? les flots-d’ùn torrent.
Que disent-ils ? la nuit l’emporte.
Que font-ils ? la tombe le prend.