Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome XII.djvu/300

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VIII Quand tout un continent tremble


Quand tout un continent tremble au souffle électrique,
Quand de la triste Europe ou de l'âpre Amérique
On voit l'étincelle jaillir,
Que l'humanité crie en son angoisse amère,
Et qu'on entend, pareille au ventre de la mère,
La sombre terre tressaillir,

Sachez, blêmes passants dont je vois la figure,
Que l'aigle Poésie à la vaste envergure
Craint peu cette convulsion;
Il n'est jamais plus fier qu'au choc des catastrophes,
Alors qu'il fait crouler l'avalanche des strophes
Du vieux mont Révolution.

Il couve les Jean Huss comme il couve les Dantes.
Sachez que, dans la trombe et sur les mers grondantes,
Ce grand oiseau toujours plana,
Et qu'il irait, sans même en sentir les secousses,
Faire son nid et tordre avec son bec des mousses
Dans le cratère de l'Etna.

Calme, il prend l'ouragan dans sa serre, et le dompte;
Il est l'esprit humain il. vole, il plane, il monte,
Dans la foudre et dans la clarté,
Étendant tour à, tour sur l'énorme fournaise
L'aile quatrevingt-neuf, l'aile quatrevingt-treize,
Immense dans l'immensité.

IX Aux heures où le ciel est noir,