Page:Ibn Khaldoun - Prolégomènes, Slane, 1863, tome I.djvu/328

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

204 PROLÉGOMÈNES

dit. » La première manière lui paraissait très-faliganle, parce que, dans ce contact avec le monde spirituel, c'était pour la première fois que la puissance, chez lui, passa à l'acte. Donc il éprouva un certain degré d'oppression, et, pour cette raison, lorsqu'il fut rentré dans le domaine de l'humanité, il ne reçut plus les communications divines excepté par la voie de l'audition. De l'autre manière, il aurait éprouvé de trop grandes souffrances. Quand on a reçu des révéla- tions plusieurs fois, on supporte plus facilement le contact du monde spirituel; rentré ensuite dans le domaine de la nature humaine, on se rappelle toutes ces communications, et surtout la portion la plus claire, c'est-à-dire les choses qu'on a vues.

Dans l'explication donnée par le Prophète, on a remarqué une grande finesse d'expression : il emploie d'abord ^ le verbe retenir ^ en lui donnant la forme du prétérit; puis il le répète sous la forme du présent. Voulant figurer au moyen de la parole les deux manières par lesquelles les révélations lui arrivaient, il en assimile la première à ^ un bourdonnement, ce qui est bien différent d'un discours, comme chacun le sait; puis il ajoute que l'acte de comprendre la révélation et de la confier à sa mémoire se faisait après que ce bruit avait cessé. Pour indiquer que la cessation était arrivée, il emploie le prétérit du verbe, et avec raison, vu que cette forme convient à ce qui est passé et fini. En décrivant la seconde manière, il nous représente l'ange sous la forme d'un homme qui parle, et il nous dit qu'à mesure qu'il entend ce discours il l'apprend par cœur. Ici l'emploi du présent con- P. 180. vient parfaitement bien, parce que cette forme du verbe indique que l'action peut continuer.

De quelque façon qu'un prophète reçoive une révélation, il éprouve un sentiment d'oppression et de souffrance, fait que Dieu lui-même a indiqué par ces mots du Coran (sourate Lxxiii, verset 5) : » Nous allons t'adresser une parole accablante. » Aïcha rapporte qu'une fa- tigue extrême était une des souffrances que Mohammed éprouvait en

' PouP JjJïf , lisez Jj^f. — ' Pour ^^-^1 . lisez J^yt.

�� �