Page:Ibn Khaldoun - Prolégomènes, Slane, 1863, tome I.djvu/556

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432 PROLEGOMENES

d'événements qui dérogeaient aux lois de la nature. Tous les cœurs s'étaient empressés à la recevoir; les hommes s'étaient dévoués à la mort pour la soutenir, et cela à cause des choses extraordinaires qui se voyaient alors : les anges venaient à leur secours sur les champs de bataille, les nouvelles leur descendaient du ciel, des com- munications leur arrivaient de la part de Dieu, chaque fois qu'une affaire grave se présentait, et on leur en donnait lecture. A cette époque, on n'avait pas besoin d'encourager l'esprit de corps; on pou- vait s'en passer, car le peuple était parfaitement soumis et obéissant; d'ailleurs les musulmans avaient, poiir s'exciter, une série de mira- cles, de manifestations divines, de visites que leur faisaient les anges, apparitions qui les obligeaient à baisser les yeux \ et dont la fré- quence les remplissait d'étonnement. Aussi la question du khalifat, les questions de la souveraineté, de la transmission de l'imamat, de l'esprit de corps et d'autres matières semblables, restèrent absorbées dans cet océan de merveilles. Lorsque la cessation des miracles eut privé l'islamisme de l'appui qui l'avait soutenu jusqu'alors , et que la généra- P. 38;i. tion témoin de ces manifestations eut disparu du monde, le senti- ment d'obéissance et de soumission s'affaiblit peu à peu; l'impression produite par tant de choses extraordinaires s'effaça , et les événements rentrèrent dans leur cours ordinaire. L'esprit de corps ayant reparu, et les événements usuels ayant repris leur marche, ainsi qu'on peut le reconnaître au bien et au mal qui en résultèrent, le khalifat, la souveraineté et leur transmission devinrent pour les Chîïtes des ma- tières d'un très-grave intérêt, ce qui n'avait pas eu lieu auparavant. Voyez fimamat au temps du Prophète : personne n'y pensait, et le Prophète ne le légua à personne. Sous les premiers khalifes, l'im- portance attachée à l'imamat devint un peu plus grande, parce qu'on avait besoin d'un chef pour défendre l'empire, combattre les infi- dèles, empêcher les apostasies et conquérir des rovaumes. A cette époque, les khalifes désignaient leurs successeurs ou n'en désignaient pas, comme bon leur semblait. Omar avait déjà exprimé son opinion

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