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dinar et du dirhem légaux aurait été ignorée au siècle des Compa- gnons du Prophète et de leurs premiers successeurs, quoique l'exé- cution des lois relatives à la dîme, aux mariages, aux peines (pé- cuniaires), etc. dépende nécessairement de celte évaluation, ainsi que nous l'avons dit. Le vrai est que l'évaluation du dinar et du dirhem légaux était connue dans ces temps-là , puisqu'il existait alors des cas dont le jugement dépendait de cette appi'éciation ; mais il n'y avait point de monnaie etFeclive pour la représenter, bien qu'on la connût dans les jugements qui se réglaient d'après l'évaluation et le poids des deux espèces réelles. Cela resta sur ce pied jusqu'à ce que l'em- pire musulman eût pris plus de développement et de grandeur. Voulant alors éviter l'embarras de la réduction des monnaies réelles en monnaies de compte', on se vit conduit à désirer la fabrication de monnaies réelles, qui, par leur valeur et par leur poids, représente- raient exactement le dinar et le dirhem légaux. Ceci eut lieu sous le khahfat d'Abd el-Melek ; il fit donc en sorte que les deux espèces lé- gales eussent chacune leur représentant positif, de sorte que la mon- naie idéale devint une monnaie réelle. Ce prince fit graver, sur le type monétaire des espèces tant d'or que d'argent, son nom et la date delà fabrication après les deux formules dont se compose la profes- sion de foi musulmane, et il retira tout à fait du cours les monnaies du temps du paganisme afin de les faire affiner et refondre pour re- cevoir le nouveau type ; ainsi elles disparurent entièrement. Voilà ce qui est vrai et incontestable.

Plus tard, les personnes chargées de la fabrication des monnaies pour l'Etat jugèrent à propos de s'éloigner des évaluations établies , par la loi ; de sorte que les espèces d'or et d'argent varièrent suivant les lieux et les pays. On en revint donc à ce que les monnaies lé- 53. gales ne fussent pius, comme dans le principe, que des monnaies idéales. Par une suite nécessaire de cela, on fut obligé partout de connaître le rapport entre la monnaie réelle et la monnaie fictive,

' L'édilion de Boulac, le manuscrit D arabe de M. deSacy portent^JiNiuJf .leçon et le texte publié dans la Chrestomathie que je préfère.

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