Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/15

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bien les grands industriels que les hauts barons de la Finance.

Quelque différente que soit la constitution de la société en France, des préoccupations analogues commencent à se répandre. A lui seul le Tolstoïsme n’aurait pas d’importance ; car il n’est qu’une maladie littéraire d’un petit nombre de délicats, blasés de civilisation et surmenés de science. Mais des faits réels ont touché l’opinion générale.

Depuis un demi-siècle les sociétés anonymes permettent de commettre aux dépens du public des exactions beaucoup plus considérables et beaucoup moins dangereuses pour leurs auteurs que celles qui dans le moyen âge primitif avaient fait qualifier certains barons d’excoriatores rusticorum. Les opérations de bourse sur les valeurs mobilières vont toujours en élargissant leur cercle et portent souvent, par le contrecoup des crises qu’elles provoquent, la perturbation dans le commerce, dans l’industrie, voire dans l’agriculture. Les spéculations gigantesques sur les marchandises de première nécessité, les grandes concentrations industrielles, les Corners et les Trusts, ne sont plus propres exclusivement à l’Amérique. Les catastrophes successives de l’Union générale du Panama, du Comptoir d’escompte, de la Société des métaux ont frappé d’autant plus vivement les imaginations populaires qu’elles ont atteint plus d’intérêts.

Les livres de M. Drumont sont venus à leur heure ; leur succès est le résultat de l’état d’esprit des lecteurs plus encore que de la verve de l’auteur. Le mot de juiverie est sur toutes les lèvres, et la défaveur qu’il exprime vise beaucoup plus les choses, depuis la Bourse jusqu’aux grands magasins, que les hommes ; car les haines de l’antisémitisme