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Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/24

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Les consommations plus abondantes des riches ne diminuent la part proportionnelle des pauvres dans la répartition du produit général que dans la mesure où ils dénaturent personnellement plus de produits, absorbent plus de nourriture et de boissons, consomment plus de vêtements, entretiennent des chiens ou des chevaux de luxe. Or, cette puissance de consommation personnelle au delà de la moyenne est limitée assez étroitement par la nature même. Le cas le plus saillant qu’on en puisse citer est celui des Landlords, qui transforment des terres labourables en parcs de chasse. La question est discutée avec beaucoup d’aigreur en Angleterre et en Écosse, où, au fur et à mesure que l’agriculture rend moins, l’opération s’est faite dans de grandes proportions. Les radicaux et le brillant économiste catholique M. Devas s’entendent pour réclamer des lois qui empêcheraient les propriétaires d’abuser ainsi de la terre. Mais ces consommations personnelles des classes riches sont peu de chose eu égard à la somme de la consommation nationale ; car, dans notre temps, les riches sont peu nombreux proportionnellement à la masse de la nation, et, en fait de superflu, le tabac et l’alcool, ces grandes consommations populaires, ont une bien autre importance. Ce sont là les consommations qu’avec les destructions publiques de la guerre et de la paix armée on peut justement rendre responsables de la diminution de la population possible chez les nations modernes.

Le luxe qui consiste en services, en domestiques, en objets manufacturés, soieries, meubles, etc., ne nuit point en soi à la population ; car l’équivalent des dépenses du riche consommateur se retrouve dans les gages des domestiques, dans les salaires des ouvriers, dans les profits des manufacturiers.

Le luxe des temps anciens consistait surtout à entretenir une suite nombreuse. Au quinzième siècle, il fallut l’énergie des Tudors pour mettre une barrière aux great retinues des seigneurs anglais, et la noblesse française garda jusqu’à Louis XIII les mêmes habitudes. Ce luxe-là était éminemment communautaire, — nous ne disons pas communiste, —