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Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/29

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Le travail personnel sous toutes ses formes, l’emploi dans l’agriculture, les arts mécaniques, le commerce, du capital, qui n’est pas autre chose que du travail accumulé et perpétué en son effet utile, le défrichement du sol et la plus-value qui lui est donnée, la constitution des grandes entreprises manufacturières et commerciales, l’invention scientifique et ses applications industrielles, les spéculations du commerce, les profits retirés des services rendus aux personnes et de l’exercice des professions dites libérales, voilà les sources d’une richesse aussi bienfaisante pour la communauté qu’avantageuse à ceux qui en jouissent.

La douloureuse expérience de ce siècle a assurément fait justice de la conception des Physiocrates et de Condorcet, à savoir que par cela seul que les hommes seraient libres et affranchis d’entraves dans l’exercice de leur activité économique, ils deviendraient meilleurs et que la société jouirait de la paix ; mais il n’en reste pas moins prouvé par l’observation des faits que tout accroissement de la richesse d’un particulier par des moyens légitimes concourt au bien commun et tend en soi à améliorer la condition des autres hommes. C’est d’ailleurs l’exercice du droit, qui naît dans l’individu et que la société a pour mission de protéger. Aussi est-ce avec raison qu’un théologien, examinant récemment la question de savoir si, sous prétexte d’harmonie et d’équilibre social, l’État avait le droit de limiter la richesse des particuliers, lorsqu’elle est légitimement acquise, répond énergiquement que non[1]. C’est là que commence le socialisme d’État.

Quant à la richesse qui provient de la spoliation par la conquête ou par l’abus de la législation en faveur d’une classe particulière, de la fraude et du dol sous leurs diverses formes, elle est évidemment malfaisante.

La question débattue en ce livre est précisément de savoir quelle est l’importance relative dans l’état actuel des sociétés des richesses légitimement acquises et des richesses malhonnêtes.

  1. P. Marin de Boylesve S. J., la Question ouvrière, p. 30 (Haton, 1891).