Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 8, 1879.djvu/526

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l’acceptant pas, peut donner un sens meilleur du mystère de cet endroit, son avis doit être suivi de préférence.

« Et du sein de ce poisson, Jonas adressant sa prière au Seigneur son Dieu, lui dit. » Jon. 2, 2. Même traduction dans les Septante, sauf un changement de place pour les mots. Puisque Jonas est la figure du Seigneur, et en ce qu’il fut trois jours et trois nuits dans le ventre de la baleine, est un emblème de la Passion du Sauveur, sa prière doit figurer aussi l’Oraison dominicale. Il y a des gens, je le sais, à qui il paraît incroyable qu’un homme ait pu être sain et sauf trois ; ours et trois nuits dans le ventre d’une haleine. Ces gens sont assurément ou des fidèles ou des infidèles. Si ce sont des fidèles, ils seront obligés d’ajouter foi à des mystères bien plus grands : Comment trois enfants jetés au milieu des flammes d’une fournaise ardente, demeurèrent si bien sains et saufs, que leurs vêtements — n’avaient même pas l’odeur du feu ; Dan. 3, 1 ; seqq. comment la mer se retira, et forma de part et d’autre homme deux murs, pour livrer passage au peuple israélite ; Exo. 14, 1 ; seqq. comment les lions, dont la faim excitait la fureur, regardèrent, sans y toucher, leur proie avec crainte, comme s’ils avaient eu la raison de l’homme ; et bien d’autres traits du même genre. Si ces personnes sont des infidèles, qu’elles lisent les quinze livres des Métamorphoses d’Ovide et toutes les histoires de la Grèce et de Rome, et elles y trouveront le changement de Daphné en laurier et des sœurs de Phaéton en peupliers ; comment Jupiter, le plus grand des dieux du paganisme, fut changé en cygne, coula en pluie d’or, prit la forme de taureau, et autres fables où l’obscénité contredit à la sainteté de la divinité. Ils croient à cela, et ils disent que tout est possible à Dieu ; pour des turpitudes, ils défendent la toute-puissance de Dieu, et ils la lui dénient pour des choses honnêtes. Quant au texte lui-même : « Et du ventre de ce poisson, Jonas adressant sa prière au Seigneur son Dieu, lui dit », nous comprenons par là qu’après s’être senti sain et sauf dans le sein de la baleine, le Prophète ne désespéra pas de la miséricorde du Seigneur et tourna toutes ses pensées vers la prière. C’est que Dieu, qui avait dit au sujet du juste : « Je suis avec lui dans la tribulation ; » Psa. 90, 15 ; « lorsqu’il m’invoquera, je répondrai : Me voici », lui vint en aide, et ayant été exaucé, il peut s’écrier : « Vous m’avez l’empli de joie dans l’affliction. » Psa. 4, 2.

« J’ai crié au Seigneur dans le fort de mon affliction, et il m’a exaucé. J’ai crié du fond de l’enfer, et vous avez entendu ma voix. » Jon. 2, 3. même traduction dans les Septante, à cette variante près : « Vous avez entendu ma voix, mon cri du fond de l’enfer. » Il dit, non pas « je crie », mais « j’ai crié », et il rend grâces, non pas pour l’avenir, mais au sujet du passé ; il nous montre que, dès l’instant où, précipité dans la mer, il a vu la baleine, sa masse monstrueuse, sa gueule affreusement