Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 8, 1879.djvu/531

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la corruption, ô Seigneur mon Dieu. » Expression fort juste : « Vous élèverez ma vie » ou « ma vie montera hors de la corruption », puisqu’il était descendu vers la corruption et les enfers. C’est là ce que les Apôtres estiment avoir été prédit de Notre-Seigneur dans le psaume quinze : « Vous n’abandonnerez point mon âme dans l’enfer, et vous ne souffrirez pas que votre saint voie la corruption. » David assurément mourut et fut enseveli ; « mais c’est la chair du Sauveur qui ne devait pas voir la corruption. D’autres expliquent notre texte en disant qu’en comparaison de la céleste béatitude et du Verbe de Dieu, le corps humain, semé dans la corruption, n’est que corruption lui-même, ce qui est signifié touchant le Juste, au psaume cent deux : « C’est lui qui guérit toutes vos infirmités, qui rachète votre vie de la mort. » De là le langage de l’Apôtre : « Malheureux homme que je suis ! qui me délivrera de ce corps de mort ? » Rom. 7, 24. La corruption, c’est donc ce corps de mort ou ce corps abject. Ceux qui avancent cette explication y cherchent un détour vers leur hérésie, pour représenter l’Antechrist sous la figure du Christ, et se rendre maîtres des Églises, afin d’accorder grasse chère à leur ventre, et de vivre selon la chair, tout en discutant contre la chair. Quant à nous, nous savons que le corps pris dans le sein de la Vierge immaculée n’a pas été corruption, mais il a été le temple de Jésus-Christ. Si, d’autre part, nous en venons à l’enseignement de l’Apôtre aux Corinthiens, où il parle de corps spirituel, 1Co. 15, 1, seqq. pour ne point paraître rechercher les contestations, je me contenterai de dire que le même corps qui a été enseveli et la même chair qui a été enfermée dans le sol ressuscitent, et que, sans changer de nature, cette chair se dépouille de son abjection pour se revêtir de gloire ; « car il faut que ce qui est corruptible se revête d’incorruptibilité, et que ce qui est mortel se revête d’immortalité. » Ibid. 53. Quand l’Apôtre dit ce, il montre pour ainsi dire le corps du doigt : ce en quoi nous naissons, ce en quoi nous mourons, ce que craignent de recevoir ceux qui doivent être punis, ce que la virginité attend pour sa récompense, que l’adultère redoute pour son châtiment. Appliqué à Jonas lui-même, le texte peut s’entendre ainsi : Dans le ventre de la baleine, conformément à la nature du corps, il eût dû se corrompre, devenir l’aliment du monstre et se décomposer comme tout aliment se décompose, au lieu qu’il y demeura sain et sauf et intact. C’est dans un élan d’affectueuse gratitude qu’il dit : « Seigneur mon Dieu », en ce qu’à cause de la grandeur du bienfait qu’il reçoit, il regarde comme son Dieu ; à lui seul, le Dieu de tous.

« Dans la douleur profonde dont mon âme a été saisie, je me suis souvenu du Seigneur. » Jon. 2, 8. Les Septante : « Lorsque mon âme était en défaillance et près de me quitter,