Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 8, 1879.djvu/539

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celle du discours, de là ce qui est dit de Babylone dans Jérémie : « Le calice d’or de Babylone qui enivre toute la terre », Jer. 51, 7. Qui ne s’est pas enivré à la coupe de l’éloquence profane ? de quel esprit ne s’est-elle pas emparée, grâce à un heureux arrangement des mots et à ses éclatants dehors d’érudition ? Les puissants, les nobles et les riches croient difficilement à Dieu, et beaucoup plus difficilement qu’eux y croient les hommes éloquents ; les richesses, l’abondance et la luxure aveuglent leur esprit, et, au milieu des vices qui les circonviennent, ils ne peuvent voir les vertus et la simplicité de l’Écriture sainte ; ils jugent, non d’après la grandeur des pensées, mais sur les apparences viles de la lettre. Mais lorsque ceux-là mêmes qui enseignaient d’abord le mal, s’étant soumis à la pénitence, enseigneront le bien, on verra les peuples ninivites convertis par une même prédication, et s’accomplir ce mot d’Isaïe : « Pourvu qu’une nation soit née. » Les hommes et les animaux couverts pareillement de sacs et criant au Seigneur, il faut les entendre en ce sens que, par la prédication de Jonas, les hommes raisonnables et les insensés, les savants et les simples d’esprit font pénitence, conformément à ce qui est dit dans le psaume : « Seigneur, vous sauverez les hommes et les bêtes. » Psa. 35, 7. On peut aussi entendre, et surtout d’après cet exemple : « Le soleil et la lune se revêtiront du cilice ; » Eze. 32, 7 ; et celui d’Isaïe : « Je revêtirai le ciel du cilice », Isa. 50, 3, par animaux recouverts de sacs, l’extérieur lugubre, le chagrin et la tristesse, appelés sac par métaphore. Dans les mots : « Qui sait si Dieu reviendra et pardonnera ? » l’événement est laissé en suspens et incertain, enfin qu’ayant des doutes sur leur salut, les hommes fassent pénitence avec plus de zèle, et provoquent davantage Dieu à la pénitence.

« Dieu considéra leurs œuvres, et voyant qu’ils s’étaient convertis en quittant leur voie criminelle, il eut pitié d’eux, et il ne leur fit point le mal qu’il avait résolu de leur faire. » Jon. 3, 10. Les Septante : « Dieu vit par leurs œuvres qu’ils avaient quitté leurs voies mauvaises, et il se repentit du mal qu’il avait menacé de leur faire, et il ne le leur fit point. » Dans l’un et l’autre sens, ou Dieu, en ce temps-là, menace les habitants de Ninive, ou chaque jour il menace les peuples du monde entier, afin qu’ils fassent pénitence. S’ils se convertissent, il renoncera lui-même à sa sentence, il sera changé par la conversion du peuple. Jérémie et Ézéchiel, plus explicites sur ce point, enseignent que le Seigneur n’accomplit, ni ses promesses de bienfaits, si les bons tombent dans les vices, ni ses menaces de maux contre les méchants qui reviennent au salut. Dieu donc voit, d’après leurs œuvres, que les Ninivites ont quitté la voie du mal ; il ne lui a pas été fait en paroles des promesses, comme en faisait souvent Israël : « Tout