cantiques et leurs psaumes seront des chants de deuil. Le peuple ne saura dire autre chose que ceci : « Nous sommes réduits à la dernière misère. » Cette terre de promission, qui avait été partagée entre les deux tribus et demi-tribus, autrefois, quand Moïse présidait au partage, et qui fut départie plus tard par Josué, fils de Navé, aux autres tribus, vient d’être distribuée aux nations parle compas d’un Romain ; et comme il ne s’est trouvé personne pour empêcher qu’il ne conquît toutes les nations, il n’y en a pas un parmi les Juifs qui foule le sol antique dans sa liberté première. Si nous voulions suivre une troisième exposition, nous pourrions appliquer tout ce que nous venons de dire à l’âme humaine dont nous disions naguère que, tombée du paradis, elle serait venue dans l’esclavage de ce monde ; nous verrons que toute pensée.à nous est travail et douleur, que le mal remplit nos couches et la lumière même qui apparaît est mêlée de ténèbres, et que tout.ee que nous préparons dans la nuit, nous l’accomplissons dans l’ombre. Qui de nous, en effet, élève à Dieu des mains saintes, exemptes de colère et de sollicitude ? qui ne désire pas les domaines de ce monde et n’oublie les richesses du paradis ? Ne voyez-vous pas qu’on ajoute les champs aux champs, les terres aux terres, et que les campagnes des villes ne suffisent pas au corps petit et chétif de l’homme. C’est pourquoi le Seigneur imagine pour nous des maux qui nous mettent dans l’impuissance de lever nos têtes et de marcher le corps droit, parce que le temps est très mauvais, selon les paroles de Jean, qui dit : « De monde est sous l’empire du malin. » 1 Jn 5, 19. C’est ce que représente encore cette fille d’Abraham, de l’Évangile, âme noble que Satan avait subjuguée et courbée, et qui ne put se redresser ni regarder son Créateur qu’à l’arrivée du Seigneur. Aussi le Sauveur dit : « Cette fille d’Abraham que Satan avait liée, ne fallait-il point qu’elle fût délivrée de ces liens un jour de sabbat ? » Luc. 13, 16. Parce que donc notre gloire est toute rasée, et que nous avons agrandi « notre calvitie et notre nudité ; » – c’est ainsi, en effet, qu’on le lit dans quelques exemplaires, – il parut des envoyés pour nous plaindre avec Jérémie, pour faire sur nous des récits et dire avec l’Apôtre : « Je pleure sur beaucoup qui ont péché et n’ont pas fait pénitence. » 2 Co. 12, 21. Qui ne se lamentera pas en voyant les âmes humaines devenir comme dos meubles divers la possession des démons et des différents vices ? Un démon tend le cordeau de la fornication, un autre de l’avarice, celui-là de l’homicide, celui-ci du parjure ; l’héritage du peuple de Dieu est partagé au cordeau et les anciens champs de la sainteté et du paradis, dont Isaac savourait le parfum dans son fils Jacob, Gen. 27, ont été livrés aux Assyriens et au roi de Babylone. Et tandis que les renards ont leurs tanières et les oiseaux du ciel leurs nids, le fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête. J’ai exposé dans la mesure de la pénétration de mon faible
Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 9, 1881.djvu/19
Apparence