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HENRY


La Chambre applaudit le ministre ; et comment n’eût-elle pas applaudi ? Nul sur ses bancs, nul sur les bancs du gouvernement ne sait rien du drame qui vient de se jouer dans les bureaux de l’État-Major. Même à Méline, Billot a tout caché.

L’affaire, pour la Chambre, était entendue. Cependant Castelin débita un long discours, non pas sur Dreyfus, qui, « étant un traître, n’est plus français », mais contre les défenseurs et les complices du Juif. Seulement, son discours ne fut pas celui qu’il avait annoncé, depuis quelques jours, dans les couloirs[1].

Il énuméra d’abord les méfaits du « Syndicat ». En premier lieu, un journal[2] a osé dire que l’ex-ministre Chautemps avait eu l’affreuse idée « d’adoucir le sort du traître et qu’il avait tenté de permettre à Mme Dreyfus de rejoindre son mari aux îles du Salut ». Ici, Brisson, qui préside, intervient : « Ces journaux ne peuvent atteindre personne ici et, j’ose le dire, personne parmi les Français. » (Quoi ! pour avoir prêté un peu d’humanité à un ministre !) « Nous avons tous, poursuit le président, la même confiance dans la loyauté des juges du conseil de guerre et nous avons tous la même horreur de la trahison ! » La Chambre éclate en applaudissements.

Castelin raconte ensuite qu’une somme considérable

    lire sa singulière déclaration… C’est vraiment fantastique… C’est montrer à la Chambre un singulier mépris… Billot est un insolent et un gâteux. » — De même Rochefort, mais avec des arguments qui semblent indiquer qu’il ne croit plus à la culpabilité de Dreyfus. (Voir p. 454.)

  1. « Les députés avec lesquels Castelin avait précédemment parlé de son interpellation remarquèrent que son attitude s’était modifiée et ils trouvèrent dans son discours tout autre chose que ce qu’il avait annoncé à ses interlocuteurs. » (Mémoires de Scheurer-Kestner.)
  2. Le Figaro. (Voir p. 329.)


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