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MORT DE LEMERCIER-PICARD


fausses dépêches, comme le document libérateur, étaient une manœuvre des ennemis de Picquart, le juge se laissa également persuader qu’elles étaient l’œuvre de Du Paty. Sacrifié par ses anciens chefs, Picquart s’était enfin résolu « à ne plus garder aucune mesure et il avait répondu à sa mise en réforme par une dénonciation plus formelle » contre Esterhazy et celui qu’il croyait son principal auxiliaire[1]. Mais ni Bertulus ni lui n’avaient l’ombre d’un soupçon contre Henry[2].

L’accusation portée par Picquart contre Du Paty l’avait été déjà par la comtesse de Comminges[3], qui

    215, Picquart. La plainte écrite de Picquart était formelle : « Le télégramme signé Speranza peut être attribué avec certitude à l’ex-agent de police Souffrain ; des renseignements adressés par la Sûreté générale au général de Pellieux en font foi. » (II, 262.) Et encore : « La lettre Speranza doit être, comme le télégramme, de la main de Souffrain. » (II, 219.) — Cass., II, 263, Bertulus : « Dès le 22 janvier, une série d’expertises en écriture commença, tant sur l’écriture de Souffrain que sur d’autres, mais aucune ne donna de résultats sérieux. Aucune charge, d’ailleurs, n’a pu être relevée contre Souffrain. » Cependant, l’expert Couderc avait attribué le télégramme à Souffrain, mais « avec des réserves » (I, 237). — Roget, parlant d’après Pellieux et Henry, continua à suspecter Souffrain. (Cass., I, 103.) — À Rennes. Bertulus raconta qu’il avait confronté Souffrain avec la jeune fille du télégraphe qui avait cru le reconnaître et que « la confrontation aboutit à une non-reconnaissance ». (I, 365 ; Enquête, 22 mars 1898.) — Voir p. 162, note 2.

  1. Cass., 1, 222, Bertulus : II. 220, Picquart : « Aujourd’hui que je n’ai plus aucune mesure à garder, j’estime qu’il est de mon devoir de vous apporter tout ce que je puis savoir, sans dévoiler le secret professionnel, de nature à éclairer la justice sur les agissements frauduleux dont je suis victime. » (28 février 1898.)
  2. La psychologie d’Henry échappa toujours à Picquart ; le 1er juillet 1902, il écrivait encore : « Je ne puis pas m’expliquer le crime du lieutenant-colonel Henry autrement que par le dévouement à la personne de ses chefs et par le désir de conserver per fas et nefas des droits à leur bienveillance. » (Grande Revue. XXIII, 9.)
  3. Enq. Bertulus, 21 janvier, comtesse de Comminges (II, 263).