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L’ENQUÊTE


qui furent rebelles au mirage ont gardé le souvenir exact de l’atmosphère où il n’y avait d’invraisemblable que la vérité. Femme d’un haut personnage qui portait intérêt à Esterhazy ou maîtresse délaissée de Picquart, si la dame voilée avait existé, il importait à la justice de la découvrir[1]. Bertulus ne dit nullement à Ducassé que Pellieux était dupe d’une fable ridicule et d’une machination infâme ; il prit note de ses indications et ordonna aussitôt à un commissaire de commencer des recherches[2].

Vilenie du père Du Lac qui a nommé sa pénitente à Boisdeffre ; vilenie de Boisdeffre et de Gonse, peut-être aussi de Billot[3], qui savent comment Esterhazy a été averti et que la cousine de Picquart n’y est pour rien ; mais nulle faute de Ducassé qui n’a fait qu’obéir à son chef.

Cependant Picquart et Clemenceau le traquèrent avec acharnement, et André flottait entre leurs sommations, qu’ils lui portèrent ensemble, et les explications de Du-

  1. Cour de cassation, 9 mai 1904, Ducassé : « Si, à cette époque, on avait pu faire intervenir cette femme, au point de vue judiciaire cela aurait éclairé probablement l’un des côtés de la justice. »
  2. Cass., I, 234, Bertulus : « Je donnai l’ordre au commissaire Bernard de commencer ses recherches. Quelques jours après, Bernard me donna le nom de la dame… Quelque temps après, le général Gonse vint me voir et me demanda où j’en étais au sujet de la dame voilée… Je lui donnai la première et la dernière lettre du nom de cette dame ; il me répondit que nous étions d’accord. Pour être bien sûr que nous nous entendions, je lui dis : « Donnez-moi le nom de la rue ; je vous donnerai le numéro de la maison. » Nous tombâmes encore d’accord. » — Dans l’intervalle entre les visites de Ducassé et de Gonse, Bertulus a reçu celle de Mme Monnier qui a protesté qu’elle n’était pas la dame voilée, mais il garde encore des doutes.
  3. Voir p. 316.