Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/115

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sé, lève un regard plein de courroux, et le peuple saisit les lances et les épées pour venger une injure qu’il ne saurait supporter, sans se rappeler ce qu’il lui en a coûté, quelques jours auparavant, de chercher querelle aux chevaliers errants.

L’enfant, à la saison nouvelle, ne court pas avec plus de plaisir parmi les fleurs vermeilles d’azur et d’or ; une dame, brillante de parure, ne se plaît pas mieux au son des instruments invitant à la danse, que Marphise n’éprouve de plaisir et d’assurance au milieu du fracas des armes et des chevaux, des lances et des épées aux pointes aiguës, prêtes à répandre le sang et la mort.

Elle pousse son cheval, et fond, impétueuse, la lance basse, sur la foule insensée. Elle transperce l’un à la gorge, l’autre en pleine poitrine ; elle jette à terre, au premier choc, tantôt celui-ci, tantôt celui-là. Puis elle frappe avec son épée sur tous à la fois, et tranche les têtes, perce les flancs, coupe les bras ou les mains.

L’ardent Astolphe et le vaillant Sansonnet, qui sont revêtus comme elle de leur cuirasse et de leur cotte de mailles, bien qu’ils ne soient pas venus pour une semblable besogne, voyant la bataille engagée, abaissent la visière de leur casque, et se précipitent la lance en arrêt sur cette canaille. Puis, taillant de droite et de gauche avec leurs épées tranchantes, ils s’ouvrent un chemin.

Les chevaliers de nations diverses, qui sont venus pour prendre part à des joutes, voient avec stupéfaction les armes employées à satisfaire une