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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/305

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Toutefois, ce fut encore Amour qui l’emporta ; car, si leur dame ne leur avait point ordonné d’en agir ainsi, la cruelle bataille ne se serait terminée qu’avec le triomphe de l’un d’eux, et c’est en vain qu’Agramant et son armée auraient réclamé leur aide. Amour n’est donc pas toujours funeste ; s’il est souvent nuisible, il est parfois utile.

Les deux chevaliers païens, ayant différé toute querelle, s’en vont maintenant au secours de l’armée d’Afrique, et se dirigent vers Paris, accompagnés de leur gente dame. Avec eux chemine aussi le petit nain qui avait suivi les traces du Tartare, et avait conduit jusqu’à lui le jaloux Rodomont.

Ils arrivent dans un pré, où plusieurs chevaliers se délassaient au bord d’un ruisseau. Deux d’entre eux étaient désarmés ; les deux autres avaient leur casque. Une dame, fort belle de visage, était avec eux. Je vous dirai ailleurs qui ils étaient, non maintenant, car j’ai à vous parler auparavant de Roger, du brave Roger qui, comme je vous l’ai raconté, avait jeté dans un puits l’écu enchanté.

Il était à peine éloigné d’un mille, qu’il vit venir en grande hâte un des courriers que le fils de Trojan avait envoyés à ses chevaliers pour réclamer leur concours. Ce courrier lui apprit que Charles tenait en un tel péril l’armée sarrasine, que si elle n’était promptement secourue elle y laisserait bien vite l’honneur et la vie.

Roger, à cette nouvelle, fut assailli par un grand nombre de pensées diverses qui lui vinrent toutes à la fois à l’esprit. Mais ce n’était ni le lieu ni le