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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/53

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Domitien et le dernier Antonin ; qu’il tira Maximin de la plèbe immonde et basse, et l’éleva à l’empire ; qu’il fit naître à Thèbes Créonte, et donna au peuple d’Agylla Mézence, qui engraissa les sillons de sang humain ; c’est pour cela que, dans des temps moins reculés, il permit que l’Italie devînt la proie des Huns, des Lombards et des Goths.

Que dirai-je d’Attila ? que dirai-je de l’inique Ezzelin da Romano, et de cent autres que Dieu, après de longs siècles de crimes, envoya pour nous punir et nous opprimer ? Et ce n’est pas seulement dans les temps antiques que nous avons de tels exemples ; nous en faisons de nos jours une claire expérience, nous qui, troupeaux inutiles et coupables dès le berceau, avons été donnés en garde aux loups enragés.

Comme si leur faim était trop vite apaisée, et que leur ventre ne pût contenir tant de chair, ceux-ci ont appelé des bois ultramontains d’autres loups plus affamés, pour achever de nous dévorer. Les ossements sans sépulture de Trasimène, de Cannes, de Trebia, paraissent peu de chose auprès de ceux qui engraissent les rives et les champs de l’Adda, de la Mella, du Ronco et du Taro.

Dieu permet que nous soyons châtiés aujourd’hui par des peuples plus coupables que nous peut-être, de nos méfaits, de nos erreurs, de nos vices multipliés à l’infini. Un temps viendra où nous irons à notre tour ravager leurs territoires, si jamais nous devenons meilleurs, et si leurs crimes