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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/54

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en arrivent à exciter l’indignation de l’éternelle Bonté.

Elles devaient sans doute avoir troublé la sérénité de Dieu, ces contrées que les Turcs et les Maures couvraient alors de viols, de meurtres, de rapines et de honte. Mais tous ces maux furent encore aggravés par la fureur de Rodomont. J’ai dit que Charles, dès qu’il eut reçu la nouvelle des ravages causés par lui, était accouru pour l’arrêter.

Il voit les malheureux coupés par morceaux joncher les rues ; les palais brûlés, les temples ruinés, une grande partie de la ville détruite. Jamais on ne vit de si cruels exemples de désolation : « Où fuyez-vous, foule épouvantée ? N ’en est-il point parmi vous qui ose contempler sa ruine, et qui ne comprenne qu’il ne vous restera plus de refuge, si vous abandonnez si lâchement cette cité ?

« Donc, un homme seul, enfermé dans votre ville dont la ceinture de murailles l’empêche de fuir, pourra se retirer sans la moindre égratignure, après vous avoir tous tués ? » Ainsi disait Charles, qui, enflammé de colère, ne pouvait supporter une telle honte. Il arrive enfin devant la grande cour du palais, où il voit le païen massacrer son peuple.

Là s’était retirée une grande partie de la population espérant y trouver du secours, car le palais était entouré de fortes murailles et approvisionné de munitions pour une longue défense.