Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/90

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vire se redresse, lorsque le pilote fait déployer les voiles au souffle naissant du vent d’ouest, ainsi Rodomont se relève sous des coups qui auraient terrassé une montagne.

Guy, Régnier, Richard, Salamon, le traître Ganelon,le fidèle Turpin, Angiolier, Angelin, Huguet, Ivon, Marc et Mathieu de la plaine Saint-Michel, et les huit autres dont j’ai fait mention plus haut, entourent le cruel Sarrasin. À eux se sont joints Ariman et Odoard d’Angleterre, entrés auparavant dans la ville.

Les hautes murailles d’une forteresse solidement assise sur un rocher des Alpes ne sont pas plus ébranlées, quand le vent du Nord ou du Sud entraîne du haut de la montagne les frênes et les sapins déracinés, que ne le fut l’orgueilleux Sarrasin, au cœur plein de dédain et altéré de sang. De même que le tonnerre suit de près la foudre, sa vengeance impitoyable suit de près sa colère.

Il frappe à la tête celui qui est le plus près de lui : c’est le malheureux Huguet de Dordogne. Il le jette à terre, la tête fendue jusqu’aux dents, bien que le casque soit de bonne trempe. Au même moment il reçoit sur tout le corps une multitude de coups ; mais ils ne lui font pas plus d’effet qu’une aiguille sur une enclume, tellement sont dures les écailles de dragon qui forment sa cuirasse.

Les remparts et la ville sont tout à fait abandonnés, car Charles a fait prévenir tous ses gens de se rendre sur la place où l’on a plus besoin