Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/167

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blanche et vermeille, épuiser toutes les fleurs de sa corbeille, quand Renaud, découvrant de loin les deux forteresses de Téaldo, leva la tête.

« Ô ville heureuse — dit-il — mon cousin Maugis, après avoir consulté les étoiles errantes et fixes, et appelé à son aide toute sa science de devin, m’a prédit — car j’ai déjà fait ce chemin avec lui — que dans les siècles futurs ta gloire rejaillirait si haut, que tu l’emporterais sur tout le reste de l’Italie. »

Pendant qu’il parlait ainsi, le bateau, qui semblait avoir des ailes, descendait rapidement le roi des fleuves, et passait tout près de la petite île qui est la plus proche de la ville. Bien qu’elle fût alors inculte et déserte, Renaud se fit une véritable fête de la revoir, car il savait combien, plus tard, elle serait belle et cultivée.

Dans son précédent voyage, qu’il avait fait en compagnie de Maugis, il avait appris de ce dernier qu’au bout de sept cents ans révolus cette île deviendrait la plus agréable de toutes celles qu’environnent mer, étang ou rivière ; à tel point, qu’après l’avoir vue, personne ne voudrait plus entendre parler de la patrie de Nausica.

Il avait appris qu’elle surpasserait par ses beaux monuments l’île si chère à Tibère, et que les arbres du jardin des Hespérides n’étaient rien en comparaison des plantes rares de toutes sortes qui devaient croître en ce beau lieu. Elle devait renfermer également plus d’espèces d’animaux que Circé n’en possédait dans ses écuries ou dans ses