Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/261

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deux jetées du port. Tous semblent se réjouir de me voir revenu d’un si long voyage.

Oh ! comme je vois le rivage orné de dames belles et sages, et de chevaliers illustres ! Que d’amis, et combien je suis touché de la joie qu’ils montrent de mon retour ! je vois sur l’extrémité du môle, Mamma et Ginevra, et les autres dames de Corregio. Véronique de Gambera, si chère à Phébus et au cœur sacré d’Aonie, est avec elles.

Je vois une autre Ginevra, issue du même sang. Près d’elle se tient Julie. Je vois Hippolyte Sforce, et Trivulzia, la damoiselle élevée dans l’antre sacré. Je te vois, ô Émilia Pia, et toi, Marguerite, qui as auprès de toi Angela Borgia et Graziosa. Avec Ricciarda d’Este, voici les belles Bianca et Diana, ainsi que leurs autres sœurs.

Voici la belle, mais plus sage encore et plus modeste Barbara Turca, qui a Laure pour compagne. Des Indes aux plus lointains rivages maures, le soleil n’éclaire pas un couple plus parfait. Voici Ginevra dont la maison de Malatesta tire un éclat tel, que jamais palais impériaux ou royaux ne possédèrent pierre plus précieuse.

Si elle se fût trouvée à Rimini, à l’époque où César, tout glorieux de la Gaule domptée, hésitait à passer le Rubicon pour marcher sur Rome, je crois qu’il aurait ployé à tout jamais sa bannière, et, se dépouillant de ses riches trophées, il les aurait mis à la disposition de Ginevra, et n’aurait plus songé à étouffer la liberté.

Voici la femme, la mère, les sœurs et les cou-