Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/35

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CHANT XXXVIII


Argument. — Roger, fidèle à l’honneur qui l’appelle auprès d’Agramant, s’en va à Arles. Bradamante et Marphise se présentent à la cour de Charles. Marphise reçoit le baptême. — Astolphe, à la tête d’une armée de Nubiens, saccage l’Afrique et menace Biserte. Agramant, instruit de ces événement, obtient de Charles de décider de la guerre entre eux par le combat singulier de deux champions élus dans chaque camp.


Dames courtoises, qui écoutez mes vers avec bienveillance, je vois à votre physionomie que cette nouvelle et brusque séparation de Roger et de sa fidèle amante vous cause un grand ennui, et que votre déplaisir n’est pas moindre que celui qu’éprouva Bradamante. Vous en concluez que la flamme amoureuse de Roger n’était pas très ardente.

Si, pour tout autre motif, il s’était éloigné de sa maîtresse malgré elle, et quand bien même il eût espéré acquérir plus de trésors que n’en possédèrent ensemble Crésus et Crassus, je croirais comme vous que le trait qui l’avait blessé n’avait point pénétré jusqu’au cœur ; car l’or ni l’argent ne peuvent remplacer une joie si pure, un si grand contentement.

Pourtant, le souci de son honneur peut non seulement l’excuser, mais le rend digne d’éloges. S’il eût agi autrement, je dis qu’il aurait mérité le