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Ce traité de Palaballa donna lieu encore à une autre réclamation assez curieuse. Si la rectification dont je viens de parler satisfit les indigènes, elle donna au contraire l’éveil aux Portugais, qui firent signer une protestation par le roi nègre du Congo, en résidence à San Salvador. Dans ce document, qui porte la date du 16 juin 1884[1], le principicule en question conteste à ses soi-disant vassaux, qui ont traité avec l’Association, le droit de le faire sans son consentement, et voit, dans les traités signés par eux, « l’intention de porter ombrage aux droits de Sa Majesté le roi de Portugal, son auguste souverain ». Il est plus que probable que, livré à lui-même, le pauvre chef de tribu que, dans cette pièce, dont la facture révèle une main exercée, on qualifie pompeusement de « Sa Majesté le roi du Congo », n’aurait pas songé à attirer l’attention sur sa chétive personne, et qu’il ne faut voir, dans la démarche tentée en son nom, qu’un essai de résistance du gouvernement de Lisbonne à des agissements qui lui déplaisaient. On peut en dire autant d’une protestation analogue des chefs de Boma, contresignée, le 16 mai 1884, par un certain nombre de négociants européens[2]. La mauvaise humeur des Portugais est d’autant plus compréhensible, que le traité avec l’Angleterre (du 26 février 1884) par lequel leur souveraineté sur le Bas-Congo aurait été consacrée, soulevait alors, en Europe, une opposition générale, devant laquelle il allait être abandonné. Malgré leur forme solennelle, ces revendications n’exercèrent aucune influence sur la suite des événements, et aujourd’hui la situation à laquelle elles se rattachaient est régularisée par des traités contre lesquels le Portugal ne peut plus réclamer, car il les a signés.

L’appropriation du sol semble avoir été réglée diverse-

  1. Mouvement géographique du 21 septembre 1884.
  2. Magalhaes, p. 32.