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dans la connaissance de l’indigène. En considérant ce travail à ce point de vue, il n’y a, je crois, dans le recueil aucune histoire, même la plus insignifiante, la plus dénuée d’intrigue ou d’intérêt passionnel qui n’apporte quelque renseignement utile.

On remarquera sans doute que beaucoup des légendes qui sont rapportées ici concernent des localités du Tonquin ou de l’Annam proprement dit, et surtout du Nghê an. Cela tient à ce que mes principaux informateurs ont été un devin et un lettré, tous deux originaires de cette province.

Au Tonquin, chaque rocher, chaque pagode a sa légende, et il n’est pas impossible, paraît-il, de se la faire conter. Ici ces traditions sont beaucoup moins communes, sans quoi, même en comptant avec les difficultés, ce recueil en contiendrait certainement un plus grand nombre.

Il ne me reste plus qu’à dire un mot de la manière dont ces légendes ont été recueillies et traduites.

Par malheur l’Européen ne peut songer à en recevoir directement communication de ceux qui les connaissent. Pour cela il faudrait courir le pays en vivant familièrement et longtemps avec les indigènes, encore le résultat serait-il loin d’être sûr.

Dans l’état actuel, quand vous demandez à un Annamite s’il connaît des histoires du temps passé, il vous répond invariablement que non, et c’est la vérité dans les trois quarts des cas, surtout si vous avez affaire à un lettré ou demi-lettré. S’il est assez familier avec vous, votre interlocuteur ne manquera pas en outre de vous demander ce que vous voulez faire de ces contes, se montrera parfaitement incapable de comprendre vos explications et en viendra à la conclusion qu’il est incompréhensible qu’un homme de sens s’occupe de pareilles fadaises, tandis qu’il y aurait encore tant de belles choses à dire dans quelque quatre ou cinq millième commentaire des livres classiques. Si c’est à une femme que s’adresse votre demande, peu s’en faut