Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/239

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tion. Le capitaliste ne prélève pas ses intérêts sur des valeurs que d’autres auraient créées, à la production desquelles lui-même n’aurait en rien concouru. Mais de mot exploitation peut avoir d’autres sens que celui de spoliation, et il nous faut maintenant passer ces autres sens en revue.


1° Il y a ou il peut y avoir exploitation lorsqu’un individu, pour telle opération économique qu’il va effectuer, n’a pas de concurrents, ou que la concurrence, entre ceux qui au même titre vont effectuer une opération économique, ne s’exerce que d’une manière imparfaite. Un monopoleur est en état d’exploiter les consommateurs qui achètent son produit : on veut dire par là que, n’ayant pas de concurrence à redouter, il est maître de fixer ses prix à sa guise. Dans ce même sens Böhm-Bawerk accorde qu’il pourra y avoir un revenu anormal du capital dû à l’exploitation des emprunteurs, là où les capitaux sont rares, les détenteurs du capital peu nombreux, et où par suite la

    l’intérêt proprement dit. Marx n’ignore pas que les capitaux empruntés sont parfois employés improductivement (liv. I, chap. 23, p. 416 du t. 1 de la trad. fr.) ; il néglige cette variété de l’intérêt. Pourquoi du moins les capitaux que l’on prête et qui sont employés productivement donnent-ils des intérêts ? parce que le profit, répond Marx, ne peut pas être retenu tout par l’emprunteur, parce que, s’il en était ainsi, l’emprunteur ne paierait rien pour l’usage de la valeur qui lui a été aliénée (chap. 21, pp. 389-390, chap. 22, p. 403, chap. 23, p. 410, etc.). Et qu’est-ce enfin qui détermine le taux de l’intérêt ? C’est, dit Marx, la concurrence : tandis que pour les autres marchandises, pour la force de travail, qui est une marchandise encore, le prix, lorsque l’offre égale la demande, équivaut au coût de la production et qu’il est réglé par les lois immanentes de la production capitaliste, pour l’intérêt il en va autrement ; il ne saurait y avoir un « taux naturel » de l’intérêt (chap. 21, p. 898) ; ce qui n’empêche pas d’ailleurs Marx d’assurer que le taux du profit exerce une influence sur celui de l’intérêt (chap. 22, pp. 403-404, etc.) — les profits extraordinaires de l’emprunteur, à vrai dire, n’intervenant pas ici le moins du monde (p.403). — On avouera que ces quelques indications sont loin de constituer une théorie vraiment scientifique de l’intérêt.