Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/251

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118. Je me suis efforcé de montrer à l’encontre de certains socialistes qu’il fallait distinguer avec le plus grand soin, dans la question de l’intérêt du capital, le point de vue spéculatif et le point de vue pratique. Les économistes socialistes ou de tendances socialistes ont cru souvent expliquer l’intérêt à l’aide de formules où l’on ne peut voir que des jugements d’ordre éthique sur ce phénomène : ils ont eu tort en cela. Mais cette confusion n’est pas la seule qu’on ait faite des deux points de vue. Il en est une autre où sont souvent tombés les économistes orthodoxes, ou simplement anti-socialistes : c’est celle qui consiste à tirer immédiatement de l’explication scientifique de l’intérêt une apologie de celui-ci.

Je n’irai pas chercher des exemples de cette confusion — qui n’est pas beaucoup moins grave que la précédente — chez les économistes des générations passées : il ne serait que trop facile d’en trouver chez les théoriciens de l’abstinence ; et ce sont les prétentions apologétiques injustifiées de ces théoriciens, bien plus encore que l’insuffisance de leurs théories, qui sont la cause du discrédit où ils sont tombés. Un exemple plus récent, celui de Böhm-Bawerk, montrera que la facilité est grande de tomber dans cette confusion, que du moins on incline aisément à y tomber ; et l’exemple sera d’autant plus curieux que Böhm-Bawerk, en bien des endroits de son ouvrage, a dit lui-même que c’étaient deux tâches différentes, d’expliquer d’une part, et d’autre part d’apprécier un fait économique.

L’intérêt joue un rôle bienfaisant dans la société économique, assure Böhm-Bawerk[1] : c’est lui en effet

  1. II, pp. 387-388.